lundi 21 mars 2022

22 mars 1939 : Klaipėda redevient Memel

 

Joachim von Ribbentrop et Juozas Urbšys le 23 mars 1939

C'est l'Ordre Livonien qui, dès 1252, créa le château de Memel (Memelburg) à l'embouchure de la rivière Dane. Des commerçants originaires de Dortmund, en Westphalie, s'installent à proximité du château. La ville de Memel reçoit en 1258 ses privilèges de cité. Elle fait partie des territoires prussiens de l’État monastique des Chevaliers Teutoniques, puis, quand ceux-ci se sécularisent (1525) du Duché puis (1701) Royaume de Prusse.



Le Traité de Versailles, signé le 28 juin 1919, déterminait les sanctions prises à l'encontre 

de l’Allemagne, et notamment fixait que le territoire de Memel était retiré à celle-ci. 
Il ne précisait toutefois pas à qui il allait être attribué ! 

En attendant que la dévolution du territoire fut décidée, la France se retrouva seule des grandes puissances pour fournir la composante des forces d'administration du territoire. Le Général de Brigade Dominique ODRY fut désigné pour exercer le commandement, et c'est le 21ème Bataillon de Chasseurs à Pied, en garnison à Gérardmer, qui fut choisi pour assurer le fonctionnement et le maintien de l'ordre.

Le Général Odry et son staff


De son côté, la jeune République de Lituanie tenait absolument à avoir un débouché maritime. Or, ne voyant rien venir, et malgré les risques, elle décida d’annexer le territoire par la force. Entre le 10 et le 15 janvier 1923, 1 400 Lituaniens accomplirent avec succès une marche sur Memel depuis le territoire lituanien. Ils ne rencontrèrent qu’une faible résistance, la France n’ayant ni les moyens ni la volonté de se lancer dans une opération de reconquête. Le 16 février 1923, les gouvernements alliés reconnurent le fait accompli et Memel fut rebaptisée Klaipėda.

Le 8 mai 1924 est signée à Paris la Convention de Klaipėda par laquelle les puissances signataires (France, Royaume-Uni, Italie et Japon) entérinent le statut de Memel en tant que territoire autonome sous souveraineté lituanienne.

Mais, le 20 mars 1939, l'Allemagne adresse un ultimatum oral à la Lituanie, exigeant que celle-ci leur redonne le territoire de Memel. Les quatre signataires de la convention de Klaipėda en 1924 - garantissant le statu quo dans la région - n'apportèrent aucune assistance. Le Royaume-Uni et la France suivent leur politique d'apaisement, tandis que l'Italie et le Japon soutiennent les demandes allemandes. La Lituanie est forcée d'accepter l'ultimatum.

Juozas Urbšys


Le 23 mars 1939 à 1 heure du matin, les Ministres des Affaires Etrangères, Joachim non Ribbentrop pour l'Allemagne et Juozas Urbšys pour la Lituanie, signèrent un traité, prenant effet le 22 mars, par lequel la Lituanie transférait volontairement (sic) la région de Klaipėda à l'Allemagne. La ville reprenait alors son nom de Memel. Les soviétiques prendront la ville le 28 janvier 1945 après un siège de trois mois et la transfèreront à la République Socialiste Soviétique de Lituanie. Elle ne reprendra son nom de Klaipėda qu'en 1947.

Hitler à Memel en mars 1939










vendredi 11 mars 2022

10 mars 1861 : mort du poète ukrainien Taras Chevtchenko

 


Taras Hryhorovytch Chevtchenko (en UkrainienТарас Григорович Шевченко) est considéré comme le plus grand poète romantique de langue ukrainienne. Il est né le 9 Mars 1814 du calendrier grégorien, et il est décédé le 10 mars 1861.

Né à Moryntsi (région de Kyīv), alors empire russe, dans une famille de paysans serfs, le jeune Taras devient orphelin à l’âge de 12 ans. Il travaille et étudie chez un diacre puis, à 14 ans, il devient serviteur chez un seigneur nommé Pavel Engelhardt, avec qui il part à Vilnius à l’automne 1828. Il y restera jusqu’au début de l’année 1831. La femme d’Engelhardt, ayant distingué des dispositions de Taras pour la peinture, obtient qu’il suive les cours du peintre Yan Roustem à l'Université de Vilnius.

Suivant son maître à Saint-Pétersbourg en tant que domestique, c’est le peintre et professeur Karl Briullov qui rachète sa liberté le 5 Mai 1838. De 1838 à 1845, Taras Chevtchenko peut alors étudier à l’Académie des Beaux-arts. C’est à Saint-Pétersbourg qu’il publie en 1840 son premier recueil de poésies romantiques, Kobzar (Le Barde). En 1842, pour illustrer son poème Kateryna, il peint un tableau éponyme qui est aujourd’hui une image emblématique de la peinture ukrainienne.



Au printemps 1846, Chevtchenko adhère à la Confrérie de Cyrille et Méthode qui avait pour objectif d’abolir le servage ainsi que les privilèges de la noblesse, la promotion de la liberté de croyance, de pensée et d’expression, et plus globalement la libération de toutes les nations slaves au sein d’un État fédéral. La confrérie n’exista que onze mois, la dénonciation d’un étudiant mettant fin à l’existence du mouvement. Bien que l’appartenance de Chevtchenko à la Confrérie ne puisse pas être officiellement prouvée, ce fut lui qui fut sanctionné le plus durement. Le 30 Mai 1847, il fut condamné à être incorporé comme simple soldat au Régiment d’Orenbourg, le Tsar Nicolas 1er ajoutant de sa propre main « sous une surveillance très étroite avec interdiction d’écrire et de dessiner ».

Taras Chevtchenko ne fut libéré de son exil militaire qu’en 1857, deux ans après la mort de Nicolas 1er. Mais il restera sous surveillance policière jusqu’à sa mort, à Saint-Pétersbourg, le 10 Mars 1861. Des 47 ans de sa vie, Chevtchenko en avait passé 24 au servage et 10 en exil. On comprend que, aujourd'hui plus que jamais, son nom soit le symbole du réveil de l’esprit national ukrainien face à l’oppression russe.



Initialement enterré à Saint-Pétersbourg, la dépouille du poète fut ramenée deux mois plus tard sur la colline de Chernecha Hora (Чернеча гора = la Colline du Moine), près de Kaniv (au sud-est de Kyiv) où sa tombe, proche du Dniepr / Днiпро, est devenue un lieu de pèlerinage pour des millions d’Ukrainiens.

Ceux qui connaissent Vilnius savent qu’il a sa statue sur Visų Šventujių gatvė, statue qui commémore le séjour du poète de 1828 à 1831 (ci-dessous).