mardi 28 mai 2013

Parution de « Lituanie, j’écris ton nom »



Le sous-titre du livre est parlant : « Histoire d’une passion partagée ».

Trente-quatre contributeurs, sous l’impulsion d’Anne-Marie Goussard, Présidente de la Coordination des Associations France – Lituanie, ont profité de la carte blanche reçue pour témoigner de leur premier contact avec la Lituanie, leur première rencontre, leur première fois. Pour certains c’était encore l’époque soviétique, pour beaucoup c’était la période du retour à l’indépendance 1990 – 1991, pour d’autres ce fut le hasard, plus récent. Vous retrouverez parmi les auteurs les plus Français des Lituaniens et les plus Lituaniens des Français !

L’intérêt réside justement dans ce patchwork de témoignages, de souvenirs, d’émotions, diversité qui essaye d’exprimer les motivations pour lesquelles nous y revenons. Proximité culturelle, tradition catholique, authenticité, liberté, résistance……Chacun a ses raisons, chacun a son histoire. Mais tous ont un point commun : l’amour que nous portons à ce pays.

Dans un mois (1er Juillet 2013), la Lituanie présidera le Conseil de l’Union Européenne. Ce livre devrait vous aider à mieux la comprendre.

« Lituanie, j’écris ton nom – Histoire d’une passion partagée », sous la coordination d’Anne-Marie Goussard, Editions L’Harmattan, 17,10 € par correspondance chez l’éditeur, 13,50 € en version numérique :
 http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&isbn=978-2-343-00707-6



dimanche 26 mai 2013

Ukraine – 25 Mai 1926 : assassinat de Symon Petliura



Symon Petliura fut l’un des personnages les plus importants du combat du peuple ukrainien pour son indépendance après la Première Guerre mondiale, devenu héros national mais, victime de la propagande soviétique, il fut assassiné à Paris le 25 Mai 1926.

Né à Poltava (partie ukrainienne de la Russie impériale) le 10 Mai 1879 dans une famille cosaque orthodoxe modeste, Symon Petliura étudie dans un établissement religieux pour des raisons économiques, mais il est exclu du séminaire à l’âge de 22 ans pour appartenance à un mouvement clandestin. En 1905, il est déjà un des dirigeants du Parti ouvrier social-démocrate ukrainien. Il change fréquemment de domicile entre Kyiv, Lviv, Moscou, Saint-Petersbourg. Il fait de la prison (1903 – 1904) et voit ses écrits censurés par les autorités russes.

Suite à la première révolution russe de Février 1917, se crée le 17 Mars 1917 une Rada centrale d’Ukraine à Kyiv, qui proclamera l’indépendance de l’Ukraine le 20 Novembre 1917, mais dans le cadre d’une future fédération russe. En Décembre 1917 débute une guerre entre l’Ukraine et la Russie soviétique, cette dernière suscitant la formation à Kharkiv d’un « gouvernement » bolchevique rival de la Rada (25 Décembre 1917). Il va s’ensuivre, de 1918 à 1920, une période chaotique de guerre d’indépendance comme l’ont aussi connue les Etats baltes.

Symon Petliura, à la tête d’un bataillon de haïdamaks milices formées de Cosaques et de paysans) repousse l’Armée rouge de Kyiv en Janvier – Février 1918, ce qui permet à l’Ukraine de proclamer son indépendance totale le 22 Janvier 1918. Mais, opposé au coup d’Etat du Général Pavlo Skoropadsky (29 Avril 1918), soutenu par les Allemands et les Austro-hongrois, lequel remplace la République Populaire Ukrainienne par un « Etat ukrainien », Petliura est emprisonné pendant 4 mois. Mais l’Hetmanat de Skoropadsky est renversé le 14 Décembre 1918 et la République Populaire ukrainienne est restaurée le 19 Décembre 1918, faisant l’union des deux rives du Dniestr le 22 Janvier 1919 (Directoire de la nouvelle République populaire ukrainienne). Symon Petliura en est l’Otaman en chef (Ministre de la Guerre), puis Président le 11 Février 1919 et mènera une politique moins gauchisante.

Dans les faits, les Ukrainiens ne parvinrent jamais à contrôler durablement le territoire qu’ils revendiquaient. Les Polonais prennent Lviv le 21 Novembre 1918. Les bolcheviques expulsent le Directoire de Kyiv en Février 1919. Le 31 Août 1919, les « Forces armées du sud de la Russie », du Général Denikine, farouchement opposé à l’indépendance de l’Ukraine, entrent à leur tour dans Kyiv. Finalement, le 5 Décembre 1919, l’Armée Populaire ukrainienne se trouve encerclée en Volhynie (nord-ouest de l’Ukraine) par tous les protagonistes (Armée blanche, armée rouge, anarchistes de Nestor Makhno et même Polonais).
C’est pendant cette période de chaos que furent perpétrés des pogroms contre les Juifs. La propagande et l’historiographie soviétique s’en emparèrent et accusèrent Symon Petliura d’être un antisémite fanatique, ce qui est contredit par les faits (il fait prononcer des peines de mort contre les responsables des pogroms) et par les témoignages de Juifs eux-mêmes.

Quittant définitivement l’Ukraine en Octobre 1920, Petliura s’installa d’abord en Pologne puis à Paris en 1924, où il continuera à lutter pour l’indépendance de l’Ukraine et où, vivant dans des conditions modestes, il dirige le gouvernement ukrainien en exil.

Angle rue Racine / bd Saint-Michel

Symon Petliura est assassiné le 25 Mai 1926 à l’angle de la rue Racine et du boulevard Saint-Michel  à Paris par un anarchiste juif, Samuel Schwarzbart, qui le rendait responsable des pogroms. A l’occasion du procès est créé la « Ligue contre les pogroms », qui deviendra la LICRA. Bien qu’ayant revendiqué l’assassinat, Schwarzbart est déclaré non coupable. On apprendra par la suite (1930), par Lavrenti Beria lui-même, que la Guépéou (Police d’Etat soviétique) avait été impliquée dans l’assassinat.



 Symon Petliura est enterré au cimetière du Montparnasse à Paris, n° 58 de la section 11.

La tombe de Symon Petliura au cimetière du Montparnasse


vendredi 24 mai 2013

Lettonie – 24 Mai 1736 : début de la construction du château de Rundāle


Le château de Rundāle

En 1559, Gotthard Kettler, cinquantième grand-maître de l’Ordre Teutonique réduit à la Livonie, conscient des progrès du luthéranisme sur son territoire, se convertit et sécularise les terres de l’Ordre à son profit. Mais ayant besoin de l’aide de la Pologne contre les attaques russes, il signe le Traité de Vilnius du 28 Novembre 1561. Par ce traité, les terres de l’Ordre sont partagée en deux : la Livonie devient vassale de la Pologne, en échange de quoi le Roi de Pologne reconnaît Gotthard Kettler et sa descendance comme Duc de Courlande et de Sémigalle sur les terres éponymes.

Anna Ivanovna

La dynastie Kettler régnera sur le Duché jusqu’en 1737, lorsque le Duc Ferdinand décède sans postérité.
Or, à Mitau (aujourd’hui Jelgava), capitale de la Courlande, réside toujours la veuve (depuis 1711) du Duc Frédéric III Kettler, Anna Ivanovna, quatrième fille du Tsar Ivan V, nièce de Pierre le Grand. Elle se console (entre autres) entre les bras d’un dénommé Ernst Johann Büren, fils d’un petit propriétaire terrien courlandais. Mais, à la mort du Tsar Pierre II (30 Janvier 1730), le Conseil privé, qui représente les intérêts des grandes familles aristocratiques de l’Empire russe, lui choisit comme successeur Anna Ivanovna, pensant ainsi limiter les pouvoirs du nouveau monarque.

Ernst Johann von Biron


Ernst Johann Büren, devenu « miraculeusement » Ernst Johann von Biron, devient tout puissant à Saint-Pétersbourg, s’entourant de ministres et de généraux allemands, instaurant un régime de terreur, la bironovchtchina. En 1737, Biron se fait élire Duc de Courlande malgré l’opposition de la noblesse locale.

Anticipant sa nomination, Ernst Johann von Biron avait confié à l’architecte italien (né à Paris !) Bartolomeo Rastrelli, architecte principal de la cour de Russie depuis 1730, le soin de lui construire une résidence d’été près de Bauska (12 km à l’ouest), ce sera Rundāle pils. Le projet est prêt en Janvier 1736 et la première pierre du futur château de Rundāle est posée le 24 Mai 1736.  

En 1738 commencent les travaux du château de la capitale de la Courlande, Mitau / Jelgava, toujours sous la direction de Rastrelli, ce qui a pour effet de ralentir les travaux à Rundāle.

Mais la Tsarine Anna Ivanovna décède le 28 Octobre 1740. Sans descendance, elle avait auparavant désigné comme successeur son petit-neveu Ivan (qui régnera sous le nom d’Ivan IV) âgé de …… 2 mois !! Mais elle avait aussi désigné Biron comme Régent. Celui-ci est toutefois rapidement écarté du pouvoir (9 Novembre 1740), arrêté, et condamné à mort, peine commuée en exil en Sibérie. Les travaux à Rundāle  et Mitau / Jelgava sont stoppés.


Ce n’est qu’en 1762 que Biron est gracié par Catherine II, et, en Janvier 1763, il revient en Courlande. Les travaux reprennent en 1764, et le château ne sera habitable (et habité) qu’à partir de 1768. Ernst Johann von Biron décède à Mitau / Jelgava le 29 Décembre 1772. Son fils Pierre lui succède et sera le dernier Duc de Courlande.


Lorsque le Duché de Courlande sera incorporé à la Russie en 1795, le château de Rundāle sera donné au Comte Valerian Zoubov, petit frère du favori du moment de l’Impératrice Catherine II, le Prince Platon Zoubov. Il passera dans la famille Chouvalov (et ce jusqu’à la Première Guerre mondiale) lorsque la jeune veuve de Valerian Zoubov se remariera avec le Comte  Andrei Chouvalov en 1824.

Très endommagé pendant la guerre d’indépendance de la Lettonie en 1919, le château devient successivement l’école communale locale, un musée d’histoire, un magasin à grains pendant la Seconde Guerre mondiale, puis un lycée. Ce n’est qu’en 1972 qu’il est définitivement installé comme musée.





mercredi 22 mai 2013

22 - 27 Mai 1948 : déportation de 40 000 Lituaniens en URSS

Monument à la mémoire des déportés, à Naujoji Vilnia, dernière gare en Lituanie sur la route de la déportation


Dès la « libération » de l’Europe de l’est par les soviétiques, ceux-ci avaient arrêté et déporté des centaines de milliers de collaborateurs, réels ou présumés, et de combattants luttant les armes à la main contre l’occupation soviétique. De même, les familles de ces résistants, principalement ukrainiens et baltes, que les soviétiques désignent comme des « bandits », sont déportées dans des villages de peuplement en Sibérie et dans le Grand Nord. De fait, à partir de 1945, sont arrêtés et déportées dans toute l’Europe centrale et orientale toutes les personnes pouvant constituer un obstacle à la mise en place de régimes prosoviétiques.

En Lituanie, entre 1945 et 1952, ce sont au moins 130 000 personnes (sans compter les partisans), dont 70 % de femmes et d’enfants, qui ont été déportés dans des camps de travail forcé, dans des coins reculés de l’URSS. Environ 28 000 y moururent, dont un quart d’enfants (moins de 16 ans). Les derniers ne revinrent qu’en 1959.   


La plus importante des déportations depuis la Lituanie s’est déroulée du 22 au 27 Mai 1948. C’est l’opération « Vesna » (« Printemps »). Elle a concerné 40 002 personnes (chiffres officiels du MVD et du MGB) dont 11 066 enfants. Elle a pour caractéristique de ne concerner que la Lituanie, sans doute parce que la résistance à l’occupation soviétique y était la plus forte. Les personnes étaient « évidemment » déportées sans pré alerte, sans procès et même sans raison apparente. 
  
Si cette nouvelle vague de terreur touchait toujours les familles des résistants, elle a coïncidé avec l’introduction de la collectivisation, laquelle imposait aux paysans qu’ils donnent leurs terres, leur bétail et leur matériel à une ferme collective, le kolkhoze.  Très peu de paysans rejoignirent volontairement le procédé, abandonnant leur propriété privée pour rejoindre un état proche de la servitude.

« Vesna » sera suivie d’une autre grande déportation, « Priboi » (25 – 28 Mars 1949), qui concernera cette fois les trois Républiques baltes. En Lituanie, 25 951 personnes seront déportées, mais ce sera la Lettonie qui, avec 41 811 déportés, sera la plus touchée. Il y aura encore l’opération « Osen » (2 – 3 Octobre 1951 : 16 150 déportés de Lituanie).

Les déportations remplirent apparemment leur rôle quand on voit la progression du pourcentage de fermes collectives par rapport à l’ensemble : 0,08 % en 1948, 3,9 % en 1949, 60,5 % en 1950, 98,8 % en 1953.  
Les derniers déportés (359) partiront les 5 – 6 Août 1952. Après la mort de Staline, le retour des déportés, notamment Lituaniens et Ukrainiens, ne se fera que très lentement et, au 1er Janvier  1959, 4 900 Lituaniens étaient encore déportés.  
      
Au-delà de la sécheresse des chiffres, il est impossible de trouver aujourd’hui une famille en Lituanie qui n’ait pas eu de déporté. Leur rendre hommage a été une des premières revendications lituaniennes de l’ère Gorbatchev. Et certains Lituaniens pensent que la Russie, héritière assumée de l’Union soviétique, devrait payer une compensation pour ce travail imposé d’esclave, tout comme l’Allemagne Fédérale a payé, à partir d’Août 2000, une compensation pour le travail forcé dans l’Allemagne nazie.  


mardi 21 mai 2013

21 Mai 1563 : mort de Martynas Mažvydas



Ceux qui se sont intéressés peu ou prou à la Lituanie connaissent au moins de nom Martynas Mažvydas. Né on ne sait pas exactement quand (vers 1510 ou 1520), on ne sait pas exactement où (en Žemaitija / Samogitie occidentale), on ne sait pas non plus s’il était roturier ou de petite noblesse.

Ce que l’on sait, c’est qu’il était Protestant, donc persécuté en Lituanie catholique, ce qui est sans doute la raison pour laquelle il accepta en 1546 l’invitation du Duc Albrecht de Prusse (1490 – 1568), premier Duc d’une Prusse sécularisée depuis 1525, de s’installer à Königsberg et d’étudier à l’Albertina (Collegium Albertinum).

Afin de diffuser la foi protestante en Prusse, le Duc Albrecht ordonna la traduction et la publication des textes luthériens dans les langues parlées par la paysannerie, à savoir le Vieux Prussien et le Lituanien. C’est ainsi qu’en 1547 Mažvydas publia Catechismvsa prasty szadei (« Les mots simples du catéchisme »), basé sur la traduction polonaise du "Kleiner Katechismus" de Martin Luther. Ce Catéchisme est premier livre imprimé en Lituanien. Le livre a été tiré à environ 200 exemplaires et 2 ont survécu jusqu’à aujourd’hui. Un se trouve à la bibliothèque de l’université de Toruń (Pologne),  l’autre à la bibliothèque de l’Université de Vilnius.

Nommé prêtre à Ragainė (aujourd’hui Neman dans l’exclave de Kaliningrad) en 1549, puis archidiacre en 1554, Mažvydas continua ses œuvres littéraires, toutes publiées à Königsberg, destinées à l’éducation de ses paroissiens. Ses livres sont publiés en Lituanien, ce qui était révolutionnaire pour l’époque et ce qui l’opposait au clergé catholique qui imposait le Polonais et le Latin.

Martynas Mažvydas meurt le 21 Mai 1563, certains disent à Königsberg (aujourd’hui Kaliningrad), d’autres à Ragainė. La Bibliothèque Nationale lituanienne, fondée en 1919, porte le nom de Martynas Mažvydas

La Bibliothèque Nationale Martynas Mažvydas 






lundi 20 mai 2013

Honoré de Balzac et les Pays baltes



Honoré de Balzac (1799 – 1850), né à Tours le 20 Mai 1799, est reconnu comme étant un des écrivains français les plus prolixes. Mais c’était aussi un grand voyageur. Ses voyages en Russie (Saint-Pétersbourg et Ukraine) avaient toutefois un but bien particulier : rencontrer sa « bonne amie » la comtesse Hańska (1801 – 1882).

Née Ewelina Rzewuska, la comtesse Hańska était portée sur le mysticisme et lisait beaucoup de romans français. Devenue une fervente admiratrice de Balzac, elle engagea en 1832 une correspondance avec lui et le rencontra pour la première fois au bord du lac de Neuchâtel. Balzac en tombe amoureux et va la courtiser pendant 17 ans. Ils se rencontrent à plusieurs reprises jusqu’en 1835, mais ce n’est qu’après le décès de son mari, Venceslav Hanski, que la comtesse accepte que Balzac vienne la retrouver à Saint-Pétersbourg, où elle s’était rendue pour régler la succession du comte.

La comtesse Hanska

Le 14 juillet 1843, Balzac fait viser son passeport à l’Ambassade de Russie à Paris et quitte la capitale le 19 juillet 1843 pour s’embarquer à Dunkerque le 21 juillet sur le paquebot à vapeur Le Devonshire. Pendant les 8 jours que va durer le voyage, il va rêver sur un plan de Saint-Pétersbourg. Il arrive à Saint-Pétersbourg le 29 juillet et va y vivre une vie discrète, apparemment suivant le désir de Mme Hańska, soucieuse « de ne pas trop montrer son célèbre et exubérant ami ». Il reçoit toutefois plusieurs invitations et voit même le Tsar « à la distance de cinq mètres » à l’occasion d’une revue de troupes à Krasnoïe Selo, mais ne lui est pas présenté. Durant ces semaines passées à Saint-Pétersbourg, il travaille peu.

C’est le 7 octobre que Balzac quittera Saint-Pétersbourg par la malle-poste, en direction de Berlin. On connaît le comportement de l’écrivain grâce aux lettres qu’un de ses compagnons de voyage, le jeune sculpteur russe Ramazanoff, qui se rendait à Rome, envoie à sa famille.

La forteresse de Narva et, derrière, celle d'Ivangorod

Leur itinéraire passe par Narva, où les lamproies qu’on lui sert au petit déjeuner inspirent a priori du dégoût à Balzac. Ce n’était que le début des déconvenues gastronomiques de l’écrivain. A Dorpat (aujourd’hui Tartu), on lui sert « un bifteck récalcitrant aussi dur que les chemins caillouteux des provinces parcourues », ce qui lui fit dire : « Il faut avoir bien faim pour manger ça; c’est un tour de force » ! A Walki (Valka), c’est une pâtisserie qui n’est pas à hauteur de ses espérances puisqu’il ne subsiste que l’enseigne, représentant des gâteaux. Le passage à Mitau (Jelgava) fut marqué par une altercation entre l’écrivain affamé et les serveuses d’une auberge, pas assez promptes à servir leur hôte. Le met tant attendu se révéla être une mauvaise soupe « Chez nous on donne ça aux cochons » fulmina-t-il. Il se consola avec une omelette qui fut le seul et maigre réconfort de ce triste repas. Heureusement que, pour compenser des qualités gastronomiques perfectibles, Balzac avait emporté un panier rempli de bouteilles de vin de Sauternes, dont la dernière sera ouverte à Tauroggen (Tauragė), à l’occasion du … petit déjeuner.

Le 10 octobre, ils sont effectivement à Tauroggen /Tauragė, aujourd’hui en Lituanie mais alors à la frontière russo-prussienne. Les passagers ne virent pas de sentinelle, la guérite étant cachée par la verdure. Sur la route, il n’y avait que deux poules qui se promenaient. « Voyez, un grand empire comme la Russie est gardé par des poules » s’exclama Balzac !   

Le samedi 14 octobre matin, Balzac arrive à Berlin où il trouve « le premier lit qui ressemble à un lit depuis qu{‘il a} quitté Dunkerque » ! Il sera de retour chez lui, à Passy, le 3 novembre au soir.

On notera que, tout au long du voyage, Balzac irritera régulièrement ses compagnons de voyage, en proclamant « qu’il n’y ait de bien que ce qui est en France ». Le jeune Ramazanoff écrira : « Il était agréable de voir son  attachement à la terre natale s’exprimer dans ses propos impétueux {…}.Mais il n’était pas agréable d’entendre ses comparaisons et ses opinions sur les autres pays ». Un défaut qui reste souvent reproché aux touristes français d’aujourd’hui……  

dimanche 19 mai 2013

Ukraine : le château de Podgoretsky



C’est par hasard que je suis tombé sur des photos de ce château, plus ou moins à l’abandon.  Il me semble intéressant et même important de par son histoire. Mais, ne l’ayant jamais vu, et ayant écrit le présent post à partir principalement d’un site en Ukrainien, qu’on veuille bien m’excuser par avance de la présence de potentielles erreurs. Je suis ouvert à de plus amples informations ... en Français !


Le château de Podgoretsky est un château renaissance fortifié, situé à l’est de Lviv, donc en Ukraine occidentale, près du village de Podgortsy. Avec les châteaux d’Olesky et de Zolochevsky, il constitue une route touristique, « Le fer à cheval doré de l’Ukraine », dans la région de Lviv. Il a été construit au XVIIe siècle, donc après l’Union de Lublin, dans la partie de la Ruthénie devenue polonaise. 

Retour sur l’Histoire.

Le château de Podgoretsky a été construit entre 1635 et 1640, sous la direction de l’architecte Andrea dell’Aqua (1584 – 1656), d’origine vénitienne, arrivé en Pologne en 1608. Il construit entre 1635 et 1640 le château de Podgoretsky au profit du Grand Hetman de la couronne, Stanisław Koniecpolski. C’est un exemple de palazzo in fortezza, palais dans la forteresse, la fonction de représentation prédominant celle de défense.  En effet, le château, de forme carrée, renaissance et baroque, est entouré de remparts et de fossés sur les côtés est, sud et ouest. La partie défensive a également une fonction d’habitation et de stockage.


Le château est entouré au nord par un parc à l’italienne, construit en même temps que le château, et au sud par un parc à la française, installé vraisemblablement au XVIIIe siècle. En face du palais, il y avait même une vigne, importée de Hongrie, et l’Hetman faisait son propre vin. En Août 1646, le Roi de Pologne Ladislas IV ( Władysław IV Waza) ) et son épouse, la princesse française Louise-Marie de Gonzague-Nevers, visitent le château nouvellement construit, lequel suscite l’admiration du couple royal.   


Le château est une première fois endommagé lors de la révolte des Cosaques zaporogues de Bohdan Khmelnitski, à partir de 1648. Remis en état, le château a appartenu un temps au Roi de Pologne Jean III Sobieski (qui avait aussi une épouse française, Marie Casimire de la Grange d’Arquien), et le Tsar Pierre 1er s’y est arrêté en 1706 pendant la Grande Guerre du Nord. L’âge d’or de Podgoretsky sera entre 1728 et 1767, après que le domaine eut été acheté par Wacław Piotr Rzewuski, un noble de la république des Deux Nations doté d’une fortune considérable.

En 1772, lors du premier partage de la Pologne – Lituanie, Piotr Rzewuski étant en exil à Moscou, Podgoretsky revint à l’Autriche-Hongrie, fut mis aux enchères, eut plusieurs propriétaires, avant de devenir un musée qui réussit à rester en bon état (notamment ses raretés du XVIIe siècle) jusqu’à la Première Guerre mondiale. Il a été relativement épargné pendant la guerre, grâce à l’action du burgrave Martin Grabikovsky, mais a souffert en 1920 pendant la guerre polono – soviétique. Il renaissait petit à petit quand les soviétiques arrivèrent en Septembre 1939, dépossédèrent le propriétaire, et en firent un Musée en 1940. Entre 1941 et 1944, il fut très sérieusement endommagé et son intérieur pillé. Une des casemates du château, transformée en dépôt de munitions, a explosé. En 1947, ce qui restait du musée est fermé et les collections transportées à Lviv. En 1949, le château devient un sanatorium pour tuberculeux et des dépendances très soviétiques sont construites dans le parc à l’italienne.


En Février 1956, le château prend feu suite à une négligence. L’incendie dure 3 jours et les conséquences sont catastrophiques, le château étant sans toit et les planchers s’étant effondrés (cf. ci-dessus). En 1960 il reprend sa fonction d’hôpital après des réparations là aussi très soviétiques. Ce n’est qu’aux alentours de 1997 que le sanatorium a quitté le château et les premières restaurations importantes n’ont commencé qu’en 1998. Mais celles-ci ne progressent que très lentement en raison des difficultés de financement. Ce n’est qu’en 2010 qu’une partie rénovée du château a été rouverte à la visite.  



Le site http://zamki-kreposti.com.ua/lvovskaya-oblast/podgoreckij-zamok-podgorcy/ raconte l’histoire très détaillée du château. Il n’est hélas qu’en Ukrainien (ou en Russe ?).  
   
Je reçois le 24 Mai les précisions suivantes de M. Jan Iwaniec, traducteur - interprète, que je remercie vivement :


Juste une petite précision toponymique concernant votre description (par ailleurs fort intéressante !) du château de Podhorce/Podgortse/Pydhyrtsy ? (j’hésite sur la transcription phonétique de l’ukrainien…). Pour permettre à vos lecteurs de mieux localiser ce château sur la carte, il faudrait plutôt éviter le nom Podgoretsky qui est un adjectif dérivé du village de Podhorce/Podgortse. Le nom actuel en ukrainien est : Підгі́рці , en russe Подгорцы,en polonais Podhorce.  Donc « Podgoretskij zamok » /russe/ =  « château podgortsien ». 

A noter que le blason de ce petit village (comptant aujourd’hui un peu plus de 1000 âmes) est …Lubicz. C’était également le blason d’une ancienne famille polonaise connue, ayant un rapport direct avec la Lituanie historique et la République de Lituanie d’aujourd’hui : Oscar, Czesław… 



vendredi 17 mai 2013

« Bons baisers de Russie » série Z



La production russe nous a offert récemment un piètre scénario de contre-espionnage à côté duquel l’affaire du Rainbow Warrior pourrait passer pour un modèle à enseigner dans les écoles d’agents secrets.

Le mardi 14 Mai, le FSB (Service Fédéral de la Sécurité, ex-KGB) a arrêté dans Moscou un employé de l’Ambassade des Etats-Unis, sans doute vrai agent de la CIA, Ryan Christopher Fogle, alors qu’il s’apprêtait – paraît-il – à essayer de recruter un membre des services secrets russes. Fogle était affublé d’une perruque blonde et sur lui ont été saisis une boussole, un couteau, un plan de Moscou, un téléphone portable hors d'âge, une forte somme d’argent et une lettre détaillée en russe, expliquant à sa « cible » qu’il lui serait remis 100 000 US$ au premier contact puis annuellement 1 million de US$ en remerciement de sa « coopération ». L’arrestation a été retransmise par Russia Today, chaîne par satellite financée par le Kremlin.



Il n’est point besoin d’être un grand spécialiste (même si ceux-ci ont abondé dans ce sens) pour comprendre que ce show tient plus des Branquignols que de James Bond ! Un ancien du GRU (Direction Générale des Renseignements), résidant désormais à Londres, cité par Radio Free Europe estime que l’affaire a été entièrement fabriquée (cf. http://www.rferl.org/content/spy-fogle-interview-soviet/24986987.html en anglais).


Certains ont fait le lien entre cette arrestation et une « conférence de presse » Twitter que  l’Ambassadeur des Etats-Unis, Michael McFaul, commençait au moment même de la nouvelle de la dite-arrestation a été annoncée.

En fait, il semblerait plus vraisemblable que cette arrestation ait surtout pour but d’apporter un soutien à la politique intérieure de Vladimir Poutine, en l’occurrence à la loi dite des agents étrangers, signée par Vladimir Poutine en Juillet 2012. Aux termes de cette loi, les ONG exerçant des activités politiques et bénéficiant d’un financement étranger reçoivent le statut d’ »agent de l’étranger ». Elles sont soumises à un statut juridique articulier qui prévoit, en cas d’infraction, une amende pouvant aller jusqu’à 1 millions de roubles (24 500 €) et des sanctions pénales pouvant conduire pendant 4 ans en prison.

Cet incident montre aussi aux Bisounours que, même si la guerre froide a officiellement disparu, les méthodes, elles, ont perduré…….

Ryan Christopher Fogle a déjà été expulsé de Russie vers les Etats-Unis.

La vidéo de l’arrestation :








lundi 13 mai 2013

8 et 9 Juin 2013 : Fêtes Consulaires à Lyon

Flyer 2012


De nouveau cette année, la ville de Lyon va accueillir les Fêtes Consulaires. Une soixantaine  de Consulats et Consulats honoraires vont, l’espace d’un week-end, essayer de mieux faire connaître le pays qu’ils représentent.



Comme les années passées, la Lituanie aura son stand mais celui-ci, compte tenu du fait qu’elle prendra le 1er Juillet la présidence du Conseil de l’Union Européenne, le dit stand occupera une surface double de celle des années précédentes. Vous pourrez y retrouver :

      # Pierre Minonzio, Consul honoraire de Lituanie en Région Rhône-Alpes
      # Anne-Marie Goussard, Consul Honoraire de Lituanie en région Champagne-Ardennes
      # Veronica Hidekel, représentante pour la France de l’agence de voyage réceptive Taïga Euro Baltika
      # Inga Lanchas, Présidente de Baltic Wawe Communication
      # Votre serviteur, Gilles Dutertre


En avant-première, vous trouverez également sur le stand le Livre "Lituanie, j'écris ton nom : histoire d'une passion partagée", édité à « L’Harmattan » par la Coordination France – Lituanie et coécrit par plusieurs passionnés de la Lituanie.  

Les Fêtes Consulaires se tiennent place Bellecour (Lyon 2° - Métro A et D, station Bellecour). Nous vous accueillerons le samedi 8 Juin de 11H à 20H et le dimanche 9 Juin de 12H à 18H. L’accès est gratuit. 






dimanche 12 mai 2013

9 Mai 1573 : Henri de Valois est élu Roi de Pologne – Grand-duc de Lituanie



(NB : les sources donnent des dates qui différent de quelques jours pour cette élection. J’ai retenu celle donné par Jean Choisnin, secrétaire de Jean de Montluc, évêque de Valence, qui y a participé)

Henri de Valois à l'âge de 14 ans

Henri, baptisé sous le prénom d’Alexandre-Edouard, est né à Fontainebleau le 19 Septembre 1551, quatrième fils du Roi de France Henri II et de Catherine de Médicis. Henri II meurt accidentellement lors d’un tournoi à l’âge de 40 ans. Son fils aîné, François II monte sur le trône à l’âge de 15 ans mais ne régnera que 17 mois. Le frère suivant, Louis, étant décédé à l’âge de 20 mois, c’est le troisième frère, Charles IX, qui monte sur le trône le 5 Décembre 1560 alors qu’il n’a que 10 ans !

Les astrologues ayant prédit à Catherine de Médicis qu’elle verrait tous ses fils sur le trône, ce qui semblait vouloir dire qu’ils mourraient jeunes et qu’elle leur survivrait, tenta de conjurer le sort en se mettant en quête d’une couronne étrangère pour son fils préféré, Alexandre-Edouard devenu Henri à sa confirmation en 1565. Un mariage avec Elisabeth 1ère d’Angleterre tint un moment la corde. Puis, Catherine de Médicis se mit en tête d’obtenir pour Henri, du Sultan Selim II,  l’investiture du Royaume d’Alger ! Jean de Montluc, évêque de Valence, lui fit sentir l’extravagance de cette idée et, en 1572, lui soumit un plan plus raisonnable.

Le Roi de Pologne – Grand-duc de Lituanie Sigismond II (En Polonais Zygmunt II August, en Lituanien Zygimantas Augustas), sans descendance, étant « attaqué d’une maladie mortelle », il serait possible de lui donner Henri de Valois comme successeur. Car on se rappellera que, suite à l’Union de Lublin (15 Août 1569), la monarchie polono-lituanienne était devenue élective. La Reine mère envoya donc à Cracovie, alors capitale du Royaume de Pologne, le fils naturel et légitimé de l’évêque de Valence, le sieur de Balagny, accompagné de Jean Choisnin, déjà cité, afin de préparer les esprits à la proposition officielle future.   

Le 5 Juillet 1572, Sigismond II décède. La diète d’élection a lieu le 5 Avril 1573. Jean de Montluc, évêque de Valence, y défend les intérêts d’Henri de Valois. Outre le Français, sont également candidats l’Archiduc Ernest d’Autriche, le Tsar Ivan IV dit le terrible et le Roi de Suède Jean III. Le 9 Mai 1573 (d’après Jean Choisnin), c’est Henri de Valois, duc d’Anjou, qui est élu par 30 000 gentilshommes.

Sur la route de Cracovie


Le 10 septembre 1573, Henri prête serment à Notre-Dame de Paris, devant les 13 Ambassadeurs qui étaient venus de Pologne à Paris lui apporter le décret de son élection. Henri quitte Paris le 27 Septembre 1573 et arrive à Cracovie le 18 Février 1574. Le 21 Février 1574, il est sacré Roi de Pologne, mais, contrairement à ce que Montluc avait promis, Henri refuse d’épouser Anna Jagellon, de 28 ans son aînée et qu’il trouve laide !

Mais, le 30 Mai 1574, le Roi de France Charles IX décède à Paris, sans doute de tuberculose, sans héritier à l’âge de 24 ans. Henri l’apprend le 14 Juin 1574. Dans la nuit du 16 Juin 1574, sans rien dire aux Polonais, Henri s’enfuit du château du Wawel dans des conditions rocambolesques que n’aurait pas reniées un soldat partant en fausse perm…… Car, outre qu’il ne s’était jamais fait à la Pologne (il écrira à sa mère le 22 Juin « France et vous valent mieux que Pologne »), il ne voulait pas se faire souffler la place de Roi de France par son petit frère François, duc d’Alençon. Henri rentre par Vienne, Venise, Turin, Chambéry et Lyon, avant d’être sacré Roi de France le 13 Février 1575.

En Avril 1575, un gentilhomme, Guy du Faur de Pibrac retourne en Pologne avec charge d’obtenir que les Polonais (mais aussi les Lituaniens et les Ruthènes) restent des sujets d’Henri III. Mais la Diète se le 4 Novembre 1575 et elle élit le duc de Transylvanie, Báthory István (Stefan Batory), qui, lui, épousera Anna Jagellon……

Henri n’aura régné que 148 jours sur la Pologne – Lituanie, mais il aura laissé les « Articles d’Henri », dispositions qui limitaient leur pouvoir et que tous les Rois qui suivirent durent signer, et la « Pacta Conventa » qui étaient des engagements personnels de chaque Roi.

En France, Henri III se heurtera à quatre guerres de religion et sera finalement assassiné à Saint-Cloud le 2 Août 1589 par le moine ligueur Jacques Clément. Le protestant Henri IV lui succédera.

Le blason de Henri de Valois, Roi de Pologne, Grand-duc de Lituanie