jeudi 2 mai 2013

Affaire Tymochenko : la CEDH condamne l’Ukraine. Et après ?



La Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) est un organe juridictionnel supranational, créé par les Etats membres du Conseil de l’Europe, dont la première session a eu lieu en Février en 1959. Son rôle est de statuer sur les requêtes individuelles ou étatiques alléguant des violations des droits civils et politiques énoncés par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Cette convention, entrée en vigueur en 1953, est un traité international en vertu duquel les Etats membres du Conseil de l’Europe garantissent les droits fondamentaux, civils et politiques, non seulement à leurs ressortissants, mais aussi à toutes les personnes relevant de leur juridiction. Elle concerne donc les 47 Etats européens membres du Conseil de l’Europe qui l’ont ratifiée (à l’exception notable du Bélarus).

Le siège de la Cour Européeene des Droits de l'Homme à Starsbourg 

Depuis 1998, le siège de la Cour est à Strasbourg et elle peut être saisie directement par les particuliers. La Cour européenne des Droits de l’Homme ne doit pas être confondue ni avec la Cour de justice de l’Union européenne qui siège à Luxembourg, ni avec la Cour internationale, organe judiciaire des Nations Unies qui, elle, siège à La Haye.  

Le 10 Août 2011, la CEDH a été saisie d’une requête introduite par Mme Ioulia Tymochenko, ex-Premier Ministre d’Ukraine, concernant ses conditions de détention. Le 14 Décembre 2011, la Cour a décidé de traiter la requête en priorité, compte-tenu du caractère sensible de l’affaire et de la gravité des allégations soulevées.

Ioulia Tymochenko

La Cour Européenne des Droits de l’Homme vient de rendre son arrêt le 30 Avril 2013 (texte du communiqué de presse : http://hudoc.echr.coe.int/sites/fra-press/pages/search.aspx?i=003-4343137-5208274). Elle conclut à la violation du droit à la liberté et à la sûreté, du droit d’obtenir à bref délai une décision d’un tribunal sur la légalité de sa détention et du droit à réparation pour une détention illégale.

La Cour précise que cet arrêt n’est pas définitif. En effet, toute partie, et là on pense évidemment à l’Etat ukrainien visé par la condamnation, peut demander dans un délai de trois mois le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre de la Cour pour un nouvel examen. In fine, l’arrêt rendu par la Grande Chambre sera définitif et donc non susceptible d’appel.

La balle est désormais dans le camp du Président ukrainien, Viktor Ianoukovytch. Il peut s’abriter derrière ce jugement pour libérer son adversaire sans perdre la face. Il lèverait ainsi l’obstacle majeur à la signature de l’accord d’association avec l’Union Européenne, accord qui devrait (conditionnel) être signé à Vilnius lors du sommet du Partenariat oriental en Novembre 2013.

Viktor Ianoukovytch

Il peut également chercher à gagner du temps, en demandant le renvoi de l’affaire devant la Grande Chambre, et en jouant sur la volonté des Européens, et notamment de la Lituanie qui présidera à partir du 1er Juillet 2013 le Conseil de l’Union Européenne, de ne pas rater le rendez-vous de l’automne et de ne pas jeter l’Ukraine dans les bras de Moscou. L’affaire est donc d’importance pour savoir de quel côté va « tomber » l’Ukraine.  

Une dernière précision. Les Etats condamnés sont tenus d’exécuter les arrêts de la Cour européenne des Droits de l’Homme. Le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe doit veiller à ce que les arrêts soient exécutés. Mais quand on voit que, rien qu’en 2011, la Turquie a été condamnée 159 fois, la Russie 121 fois et l’Ukraine 105 fois, on peut avoir des doutes légitimes quant à la portée de telles condamnations.

Mon analyse personnelle (mais je me trompe peut-être) est que Mme Ioulia Tymochenko est encore en prison pour un certain temps, ne serait-ce que jusqu’aux élections présidentielles de 2015 incluses.

Le site de la Cour Européenne des Droits de l’Homme : http://www.echr.coe.int/ECHR/homepage_fr    








  

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