mercredi 4 décembre 2013

4 et 5 Décembre 1905 : Grand Seimas de Vilnius


Depuis les trois partitions de la Pologne – Lituanie (1772, 1793, 1795), le Grand-duché de Lituanie était partie intégrante de l’Empire russe. Après l’échec du soulèvement de 1863, la Lituanie fut même soumise à une politique de russification et de restriction des droits politiques. Mais ces décisions eurent un impact relativement limité sur le « Réveil National Lituanien » (Lietuvių tautinis atgimimas) et les premiers partis politiques lituaniens avaient même inscrit l’autonomie de la Lituanie au sein de l’Empire russe à leur programme.

Le Tsar Nicolas II

La situation évolua après le « Dimanche sanglant » lorsque, le 22 Janvier 1905, la Garde impériale tira à Saint-Pétersbourg, notamment perspective Nevski, sur la foule désarmée, conduite par le Pope Georgy Gapon, venue présenter une pétition au Tsar Nicolas II. Le Tsar était absent du Palais d’Hiver, mais le peuple russe perdit toutefois toute confiance en lui.

A la suite de cet événement tragique, l’agitation se développa, que ce soit dans les villes et les campagnes, voire dans l’Armée (c’est à partir du 14 Juin 1905 que se déroule à Odessa la mutinerie du cuirassé Potemkine). Les bourgeois demandaient des libertés constitutionnelles et politiques, les ouvriers exprimaient des revendications sociales, les paysans occupaient les grands domaines. En Pologne, en Finlande, dans le Caucases et dans les Provinces baltes, les nationalités demandaient leur autonomie.

Le comte Sergei Witte

Le décret le plus important, le Manifeste d’Octobre, fut pris le 30 Octobre 1905 par le Tsar, sous l’influence du Comte Sergei Witte, Président du Comité des Ministres. Le Manifeste accordait les libertés civiles de base, et les libertés d’association, de la presse, de religion et de parole. Il accordait en outre le droit de vote aux hommes. Ce Manifeste fut le précurseur de la première Constitution russe du 23 Avril 1906.

Le Manifeste d’Octobre annonçant l’intention d’organiser des élections à la Douma, les Lituaniens prétextèrent de la nécessité de préparer ces élections pour convoquer un Seimas, au sens approchant que celui-ci avait dans le Grand-duché de Lituanie (réunion de la noblesse sur demande du Grand-duc ou lors d’un interrègne). Initialement, l’organisation était assurée par le Parti Démocrate Chrétien et par le journal modéré Vilniaus Žinios

Le lieu de la réunion, actuelle salle de concert de l'orchestre philarmonique 

Le 4 Décembre 1905, 2 000 délégués convergèrent vers Vilnius. Parmi eux, on remarquait 7 femmes, ce qui fit peut-être de ce Seimas le premier Parlement en Europe à inclure des femmes. La Présidence échut à Jonas Basanavičius, promoteur de l’identité nationale de la Lituanie et fondateur du premier journal en langue lituanienne, Aušra.

Jonas Basanavičius en 1890

Le sujet traité le plus important fut celui de l’autonomie. Une rumeur courait selon laquelle des politiciens russes souhaitaient accorder son autonomie à une Pologne dans laquelle serait incorporée la Lituanie. En réaction, une large majorité de délégués du Grand Seimas demandèrent l’autonomie des « territoires ethnographiquement lituaniens », incluant le Gouvernorat de Suwałki, à l’époque partie de la Pologne du Congrès.   

Une résolution fut adoptée et imprimée à 36 000 exemplaires dans la nuit du 5 au 6 Décembre. Elle stipulait que le gouvernement tsariste était le pire ennemi de la Lituanie, demandait l’autonomie, estimait les moyens acceptables pour y parvenir et demandait que l’enseignement se fasse dans la langue maternelle des enfants par des professeurs choisis par le peuple.

Carte du découpage administratif de la Lituanie jusqu'en 1914

Les mesures adoptées furent mises en œuvre dans 50 % des volosts (divisions administratives comparables aux rajons actuels). Mais, après une période de flottement, les forces susses reprirent les choses en main de façon « relativement » pacifique. De nombreux leaders lituaniens furent toutefois arrêtés et envoyés en Sibérie. 

Pendant ce temps-là, à Moscou, la répression battait son plein et des affrontements firent plus d’un millier de morts entre le 22 Décembre 1905 et le 1er Janvier 1906. Nicolas II avait néanmoins octroyé une Constitution garantissant les libertés fondamentales et une Douma fut élue. Mais celle-ci fut dissoute par deux fois jusqu’à l’élection d’une majorité docile et favorable au Tsar. On en était revenu à un fonctionnement de type autocratique …… jusqu’en 1917.  

Grandes armoiries de l'Empire russe jusqu'en 1917




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