Le Royaume de Pologne, tout comme le Grand-duché de Lituanie, avait
été rayé de la carte d’Europe lors des trois partages de 1772, 1793 et 1795, au
profit de la Prusse, de l’Autriche-Hongrie et de la Russie. Napoléon 1er
ressuscitera un éphémère Duché de
Varsovie à partir de 1807,
mais lequel ne survivra pas à sa chute (occupation par les Russes à partir de
mars 1813). Lors du Congrès de Vienne (1815), la plus grande partie du Duché de Varsovie
devient le Royaume de Pologne, dit Royaume
du Congrès, Etat autonome sous tutelle russe, dont le souverain est le Tsar,
en l’occurrence Alexandre 1er.
Suite à l’échec de
l’insurrection de 1863, l’unité administrative avec la Russie est établie et le
Russe devient langue officielle. En 1868, les territoires du Royaume du Congrès sont incorporés
comme provinces de l’Empire russe, sous le nom de « Pays de la Vistule ». La russification se poursuit sous les
règnes d’Alexandre II (règne de 1855 à 1881) et d’Alexandre III (règne de 1881
à 1894). Le début du règne de Nicolas II (1894 – 1917) connaît un relâchement
sensible, qui permet l’apparition de grands partis politiques.
Roman Dmowski |
Ainsi, lors des élections de
1906 à la Douma
russe, qui ont suivi la Révolution de 1905, sur les 36 députés auxquels le
« Pays de la Vistule » a droit, 34 provenait du Parti
National-Démocrate (Stronnictwo
Narodowo-Demokratyczne - SND) de Roman Dmowski. Mais
l’Assemblée, qui réclamait des réformes vigoureuses, sera dissoute au bout de
deux mois !
Durant la période plutôt
répressive qui suit, le Parti Socialiste Polonais (Polska Partia Socjalistyczna - PPS) de Józef
Piłsudski (exilé en Sibérie
de 1887 à 1892) va jouer un rôle important dans l’action clandestine. C’est en
fait le seul parti politique qui prônait la violence pour obtenir l’indépendance
de la Pologne, au contraire des autres partis, dont le SND, qui adoptait une
position de conciliation pour obtenir une autonomie limitée. Il forma des
organisations paramilitaires sous le couvert de clubs sportifs.
Józef Piłsudski |
Dès avant le déclenchement de la guerre, Piłsudski
avait déclaré que, pour que la Pologne recouvre son indépendance, il fallait
que la Russie soit battue par les Empires centraux (Autriche-Hongrie et Empire
allemand). Par contre son rival, Roman Dmowski, considérait que le meilleur moyen d’obtenir
une Pologne unifiée et indépendante était de soutenir la Triple-Entente (France,
Royaume-Uni, Russie) contre les Empires centraux. On trouvera donc des Polonais dans les armées des trois
empires qui les occupaient.
Ce n’est donc pas une
surprise, au début de la guerre, de retrouver Józef Piłsudski combattant dans l’Armée austro-hongroise à la
tête des Légions polonaises de Galicie. Les Légions polonaises compteront un
total de 20 000 hommes répartis en trois Brigades, Piłsudski étant
à la tête de la 1ère et la 2ème par le Général Józef
Haller de Hallenburg (que l’on retrouvera en 1918 en
France à la tête de l’Armée bleue).
Général Józef Haller |
Roman Dmowski, pour qui l’ennemi le plus dangereux était l’Allemagne, sera,
lui, obligé d’attendre la révolution de février 1917 pour créer des unités
polonaises, dans la mesure où les Russes bloquaient toute constitution d’un
mouvement national. Début avril 1917, un Comité National Polonais s’installe à
Paris sous la direction de Roman Dmowski et du pianiste Ignacy
Paderewski, comité qui sera reconnu par la France, le Royaume-Uni, l’Italie
et les Etats-Unis. Mais, dès août 1914, la diaspora polonaise avait créé en France
un Comité
des Volontaires Polonais et nombreux seront les Polonais à s’engager
dans la Légion Etrangère et à combattre à partir du printemps 1815 en Artois,
en Picardie et en Champagne.
Au final, ce sont entre 2,5 et 3,4 millions de
Polonais qui combattront sur tous les fronts d’Europe durant la Première guerre
mondiale : 1,2 millions dans l’armée russe, 250 000 dans l’armée
austro-hongroise, 800 000 dans l’armée allemande et 200 000 dans l’armée
française. Les pertes militaires s’élèveront à 500 000 morts (dont 50 000
sur le territoire français) et 700 000 blessés.