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samedi 23 novembre 2019

21-22 novembre 1919 : bataille de Radviliškis (Lituanie)



Après les trois partitions de la République des Deux Nations polono-lituanienne (1772 – 1793 – 1795), le Grand-duché de Lituanie fut annexé par l'Empire russe. Au cours du XIXe siècle, le Mouvement de la Renaissance lituanienne ( Lietuvių tautinis atgimimas) déboucha au début du Xxe siècle sur la revendication d'un Etat-Nation.

Le 16 février 1918, le Conseil de Lituanie (Lietuvos Taryba ) déclarait le rétablissement de l'indépendance de la Lituanie.

Après l'armistice sur le front ouest du 11 novembre 1918, la jeune République lituanienne forma un gouvernement sous la direction d'Augustinas Voldemaras. La première décision législative du nouveau gouvernement fut de créer une armée nationale. Car la Lituanie eut rapidement à affronter trois guerres, parfois simultanément :
# Guerre contre les Bolcheviques (12 décembre 1918 – 12 juillet 1920)
# Guerre contre les Polonais ((avril 1919 – 29 novembre 1920)
# Guerre contre les Bermontininkai (26 juillet – 15 décembre 1919)

Augustinas Voldemaras

En juin 1919, alors que l'armée lituanienne est totalement engagée contre les Bolcheviques, elle va devoir défendre son territoire contre les Bermontininkai, ainsi appelés d'après le nom de leur leader Pavel Bermondt-Avalov. Ils constituaient officiellement l'Armée des Volontaires de l'Ouest (Западная добровольческая армия, Zapadnaja dobrovoltšeskaja armija ou ZDA), formée principalement avec des corps francs allemands, des barons baltes ( = germaniques) et des prisonniers russes capturés par les Allemands.

Pavel Bermondt-Avalov

Au début, les Bermontininkai opéraient principalement en Lettonie mais, en juin 1919, il passèrent la frontière nord lituanienne et s'emparèrent de la ville de Kuršėnai. En octobre, la ZDA avait occupé une portion significative du nord et du centre de la Lituanie, comprenant les villes de Šiauliai, Biržai et Radviliškis, où les Bermontininkai terrorisaient la population locale.

Mais, en ce même mois d'octobre, les forces lituaniennes, aux ordres du futur Général Kazys Ladyga, prirent l’offensive contre la ZDA. Le Bataillon de Mariampolė reprit Seduva le 6 octobre. Les 4e et 5e Régiments d'Infanterie libérèrent Šiauliai. Mais la victoire décisive eut lieu à Radviliškis les 21 et 22 novembre 1919, où les 1er et 2e Régiments d'Infanterie infligèrent une lourde défaite à la ZDA, saisissant un important matériel de guerre, dont notamment 30 avions (photo en en-tête) et 10 canons.

Général Kazys Ladyga


Il faudra toutefois toute l'énergie de la Commission interalliée chargée du contrôle de l'évacuation des troupes allemandes, aux ordres du Général français Albert Niessel, pour que les troupes de Bermondt-Avalov quittent la Lituanie pour la Prusse orientale le 15 décembre 1919.

Général Albert Niessel


jeudi 21 novembre 2019

In memoriam Ričardas Bačkis



(Texte transmis par la famille)

Le 19 novembre de l’année 2019, Richard Bačkis, ancien ambassadeur de Lituanie en
France, représentant actif des Lituaniens de l’étranger, Chevalier de l’ordre lituanien
du grand-duc Gediminas, Commandeur de la légion d’honneur française, est décédé
dans sa 86ème année.

Richard Bačkis est né le 23 octobre 1934 à Kaunas, en Lituanie. Son père Stasys Antanas, nommé
diplomate à Paris, s’installa dans la capitale française de façon durable après l’invasion soviétique de la Lituanie lors de la Seconde Guerre mondiale. Richard Bačkis y obtient le diplôme de l’Institut d’Etudes Politiques, un DES de droit et le diplôme de l’Institut d’Administration des Entreprises à la Sorbonne.

Il travaille alors dans une multinationale – Unilever, au siège de Rotterdam et Londres, puis passe trois années en Espagne et sillonne l’Europe au grès des mutations et des missions qui lui sont assignées.

Son père – devenu chef de la diplomatie de la Lituanie indépendante durant les années d’occupation, a transmis à ses fils Richard et Audrys (devenu plus tard archevêque de Vilnius), l’amour de la patrie et de l’église. Ardent défenseur de l’indépendance de la Lituanie, Richard Backis ne cesse de militer pour faire entendre partout où il passe la voix d’une Lituanie opprimée par l’Union soviétique mais mue par un farouche désir de liberté.

Président de la Communauté Lituanienne en France, participant actif de la communauté internationale lituanienne, il garda sa fidélité à sa patrie durant les 50 années d’occupation, maintenant son passeport d’apatride sans jamais s’engager envers un autre pays. Il se maria avec Zivilé Bernotaité, lituanienne avec qui ils auront successivement 3 fils : Vytautas, Rimvydas, Andrius puis une fille Daina.

En 1989 il abandonne toute activité professionnelle pour soutenir auprès du gouvernement français le
mouvement d’indépendance Sajudis, il devient en 1990 représentant officieux de V. Lansbergis et du Gouvernement lituanien quand la Lituanie proclame unilatéralement son indépendance vis-à-vis de l’URSS, et lutte pour que la Lituanie soit à nouveau reconnue comme Etat indépendant. De 1994 à 1998, il devient ambassadeur de Lituanie en France.

A la fin de son mandat (en 1998), il poursuit ses activités en développant des échanges culturels mettant en avant les artistes lituaniens, fut en particulier de longues années président de l’association des amis de Milosz, en soutenant les associations en lien avec la Lituanie, en représentant les industriels lituaniens pour accroître les liens économiques, en se battant auprès des institutions pour favoriser l’intégration de la Lituanie aux structures occidentales.

Celles et ceux qui l’ont connu se souviendront de cette forte personnalité, du patriote lituanien et de ce père aimant.

La veillée funèbre aura lieu à l’Eglise des St. Jeans de Vinius vendredi 22 novembre de 16h à 20h et
samedi 23 novembre à partir de 9h. La messe aura lieu samedi 23 novembre à 11h. L'inhumation aura lieu à la suite au cimetière d'Antakalnis à Vilnius. 

Vytautas Landsbergis et Richard Backis


lundi 18 novembre 2019

Daudz Laimes Latvija ! Bonne Fête Nationale à la Lettonie !

Déclaration d'Indépendance du 18 novembre 1918 au Théâtre National de Riga


En ce 18 Novembre 2019, la Lettonie fête le 101ème anniversaire de sa déclaration d’indépendance du 18 Novembre 1918.


Au début de la Première Guerre mondiale, les Lettons avaient pris délibérément fait et cause pour l’Empire russe, espérant, grâce à la victoire de celui-ci, se débarrasser des barons baltes (descendants des Teutoniques) et de l’emprise germanique qu’ils enduraient depuis le XIIIe siècle ! Le 23 Juillet 1915, alors que les forces russes étaient en difficulté, les troupes allemandes occupant la Courlande et progressant vers Riga, un oukase du Tsar Nicolas II permettait la création de Régiments de tirailleurs lettons, premières unités autorisées à se battre sous le drapeau de la Lettonie, avec un encadrement letton.
 
Mais la révolution russe d’Octobre (Novembre 1917) et l’effondrement militaire de la Russie vint changer la donne. L’Allemagne imposa en effet sa domination militaire sur les États baltes. Une partie des unités de tirailleurs lettons devinrent le fer de lance de l’Armée rouge, nouvellement créée. Par l’armistice du 11 Novembre 1918, les troupes allemandes vaincues étaient tenues de ne pas quitter leurs positions sur le front oriental, afin de contrer une éventuelle offensive bolchevique. L’armistice qui marqua à l'ouest la fin des hostilités ne signifia pour autant pas l’arrêt des combats sur le front de l’est.

La République de Lettonie proclama donc son indépendance le 18 Novembre 1918 à 16H, au Théâtre National de Riga. Mais celle-ci restera théorique car, en dépit de la présence des troupes allemandes, la Lettonie sera presque totalement occupée par l’Armée rouge à la fin Janvier 1919.

En dépit d’une politique française relativement floue, accordant la priorité de son soutien à la Pologne et traînant quelque peu les pieds pour reconnaître l’indépendance des États baltes, des Officiers français ont toutefois eu une action réellement déterminante lors de la guerre d’indépendance lettone.

Le Général Janin

Il s’agit du Lieutenant-colonel du Parquet, chef de la Mission Militaire Française en Lettonie (Mai 1919 – Juillet 1920), du Capitaine de Vaisseau Brisson, commandant la flotte alliée devant Riga en Octobre 1919, du Général Niessel, Président de la Commission interalliée des Pays Baltiques, grâce à qui les Allemands évacueront les Pays baltes (Novembre – Décembre 1919), sans oublier le Général Janin qui, depuis la Sibérie, organisera le retour dans leur pays des tirailleurs lettons « blancs » (Juin 1920). Je n'oublierai pas non plus la Compagnie de chars Renault FT-17 du Capitaine Jean Dufour à la bataille de Daugavpils (3 janvier 1920). Ils ont été récemment mis en exergue par l'Ambassade de France à Riga.

Le Capitaine de Vaisseau Brisson

Après bien des réticences, liées au désir de voir renaître une Russie forte et aux doutes quant à la viabilité d’un État letton, les puissances alliées ne reconnaîtront de jure l’indépendance de la Lettonie que le 26 Janvier 1921. La candidature de la Lettonie à la Société des Nations sera rejetée une première fois le 16 décembre 1920 et il faudra attendre le 22 Septembre 1921 pour qu’elle puisse y adhérer, en même temps que l’Estonie et la Lituanie.

Le Lieutenant-colonel du Parquet


 Bonne Fête Nationale à la Lettonie et aux Lettons ! 





lundi 11 novembre 2019

En Lettonie, le 11 novembre est le jour de Lāčplēšis

Lāčplēsis sur le Monument de la Liberté à Riga


Le 11 novembre 1918, date de signature du cessez-le-feu mettant fin aux combats de la Première Guerre mondiale, et non pas fin de la guerre comme on le dit souvent d'une façon erronée, est encore largement célébré en France et en Europe de l'ouest. Mais la Lettonie célèbre, elle, un autre 11 novembre. 

Le 11 Novembre que les Lettons célèbrent est en effet le Jour de Lāčplēšis (Lāčplēša Diena). Ce jour a pour objet de commémorer le combat de tous les habitants de la Lettonie contre tous les envahisseurs (et Dieu sait qu’ils ont été nombreux !).

Mais, sur le plan historique, c’est une réminiscence du 11 Novembre 1919, victoire dans la guerre de libération nationale, qui s’est déroulée de Décembre 1918 à Août 1920. Ce jour-là marque la fin de la bataille de Riga, victoire définitive de l’armée lettone sur celle de Bermondt-Avalov, ce pseudo prince russe, mais véritable aventurier aux origines incertaines, qui avait formé des Corps francs russo-allemands, avec la bénédiction du général allemand von der Goltz censé avoir retiré ses troupes de Lettonie. 

Le nom de Lāčplēšis fait référence au personnage central d’un poème épique éponyme, écrit entre 1872 et 1887, à l’époque donc de la Renaissance nationale du peuple letton, par Andrejs Pumpurs (1841 – 1902), une figure marquante du mouvement «Jaunlatvieši » (« Nouveaux Lettons »).

Andrejs Pumpurs


Lāčplēsis avait été choisi par les dieux pour devenir le héros de son peuple. Son nom signifie pourfendeur d’ours car, jeune homme, il avait déchiqueté un ours à mains nues, épisode qui apparaît sur le socle du Monument de la Liberté à Riga (photo en début d'article). Après maintes aventures, où la lutte de Lāčplēsis contre les Germaniques est omniprésente, le héros disparaît finalement dans la Daugava avec son dernier adversaire, le Chevalier noir, celui-ci ayant découvert que la force de Lāčplēsis résidait dans ses oreilles (sa mère étant une ourse). Mais la légende dit que Lāčplēsis reviendra pour libérer son pays en rejetant le monstre à ma mer. Les ennemis potentiels de la Lettonie sont prévenus.

Célébration de Lāčplēsis ce 11 novembre 2019

Étonnant donc que le récit épique d'un héros de fiction soit devenu une fête nationale ! Et pas seulement car, sous le vocable de Lāčplēsis on trouve aussi de la bière et un opéra rock !

Il existe également un Ordre de Lāčplēsis, dont les premiers récipiendaires l’ont reçu le 11 Novembre 1920 (il a été attribué jusqu’en 1928). Parmi les récipiendaires, j’ai compté 49 Français qui s’étaient principalement illustrés lors de la guerre d’indépendance de la Lettonie, dont certains sont bien connus des spécialistes de cette période : le Général Niessel, le Général Janin, le Capitaine de Vaisseau Brisson et le Lieutenant-colonel du Parquet. Mais on trouve également le Maréchal Foch et le Général Weygand, ainsi que la ville de Verdun.