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samedi 31 octobre 2020

31 Octobre 1517: les 95 thèses de Luther et leurs conséquence en Livonie

 

Martin Luther

Même en l’absence de témoignage direct sur l’événement, l’affichage sur les portes de la chapelle du château de Wittenberg (ville de Saxe-Anhalt située au bord de l’Elbe), le 31 Octobre 1517, de ses « 95 thèses » par le moine et théologien allemand Martin Luther (1483 – 1546) est logique avec les usages du temps. Cet affichage est d'ailleurs rapporté par un philosophe professeur à Wittenberg du nom de …… Mélanchthon.



Affichage des 95 thèses

Les 95 thèses condamnaient violemment la vente d’indulgences que pratiquait l’Eglise Catholique Romaine, et plus durement encore les pratiques du Haut clergé et notamment de la Papauté. On peut consulter les 95 thèses, dont le nom officiel est Martini Lutheri disputatio pro declaratione virtutis indulgentiarum, par exemple surhttp://fr.wikipedia.org/wiki/95_th%C3%A8ses.

Ce faisant, Martin Luther ne se doutait pas qu’il allait créer une nouvelle religion et bouleverser, moins d'un demi-siècle plus tard, l’équilibre géopolitique de la région balte, notamment en Livonie.

Sur le territoire de ce qui est aujourd’hui – grosso modo – la Lettonie et l’Estonie, la Confédération livonienne exista de 1228 à 1560. Elle regroupait cinq petits États : l’Ordre Livonien, l’archevêché de Riga et les évêchés de Dorpat (aujourd’hui Tartu), d’Ősel-Wiek et de Courlande. Créée par le Légat du Pape en 1228, afin de minimiser les conflits, la Confédération était en fait contrôlée par les Chevaliers Porte-Glaive.


La Livonie en 1534

Mais, en 1558, Ivan IV, premier tsar de Russie, déclenche la Guerre de Livonie car il veut accéder à, et au-delà dominer, la Mer Baltique. La Russie emporte des succès initiaux, et envahit la Confédération livonienne. Affaibli, le Maître de l’Ordre livonien, Gothard Kettler, doit se résoudre, en 1559, à demander l’aide de Sigismond II Auguste,Roi de Pologne Grand-duc de Lituanie, moyennant des concessions. Parallèlement, Gothard Kettler, conscient des progrès du luthéranisme parmi ses sujets, se convertit et sécularise à son profit les terres de l'Ordre (attitude qui ressemble à celle d'Albert de Brandebourg, dernier Grand-maître de l’Ordre Teutonique en Prusse, en 1525).


Le Traité de Vilnius est signé le 28 Novembre 1561Par ce Traité, la Confédération livonienne résiduelle reconnaît la suzeraineté du Roi de Pologne – Grand-duc de Lituanie (Pacta subiectionis). Gothard Kettler, dernier Maître de l’Ordre livonien, devient Duc héréditaire de Courlande et de Sémigalle, vassal de Sigismond II Auguste ; le reste du pays est placé sous administration lituanienne. La capitale du Duché passe de Riga, restée polonaise, à Mitau (aujourd’hui Jelgava).  


Le 5 Mars 1562, Gothard Kettler dépose solennellement à Rīga le manteau des Chevaliers Porte-Glaive, en faisant allégeance au Roi de Pologne, représenté par Nicolas IV Radziwiłł, Palatin de Vilnius et Gouverneur de la Livonie. Il épouse en 1566 la princesse Anne von Mecklembourg-Schwerin et il s’ensuit une dynastie Kettler jusqu’en 1737. Le 25 Juin 1570, il publie les « Privilegium Gotthardium », la première Constitution de Courlande.



Gothard Kettler








mardi 20 octobre 2020

L'Initiative des Trois mers

 

Ce lundi 19 octobre 2020 a eu lieu à Tallinn le sommet des 12 Chefs d’États membres de l'Initiative des Trois mers. A la vérité, seuls les Présidents Andrzej Duda de Pologne et Rumen Radev de Bulgarie avaient fait le déplacement, accueillis par la Présidente estonienne, Mme Kersti Kaljulaid.



Lancée en 2016 sous l'impulsion de la Pologne et de la Croatie, l’Initiative des Trois mers réunit 12 pays d’Europe centrale, membres de l’UE, pour renforcer la coopération économique dans l’espace entre la Baltique, l’Adriatique et la mer Noire, selon un axe Nord-Sud. Le premier sommet a eu lieu à Dubrovnik (2016 – Croatie), puis ce furent Varsovie (2017 – Pologne), Bucarest (2018 – Roumanie), Ljubljana (2019 – Slovénie) avant donc Tallinn (Estonie). Le sommet virtuel de cette année a été également rejoint par de hauts fonctionnaires des États-Unis et de la Commission européenne.

Les pays membres sont, par ordre alphabétique anglais, l'Autriche, la Bulgarie, la Croatie, la République Tchèque, l'Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie, et la Slovénie. Membres de l'Union Européenne, ils sont également – à l'exception de l'Autriche – membres de l'OTAN.



Le sommet de Dubrovnik de 2016 s'était terminé par une déclaration d'intention de coopération en matière économique, en particulier dans le domaine de l'énergie et des transports et de l'infrastructure de communication. De ce fait, ce n'est pas une surprise que l'initiative soit liée à deux projets d'envergure, une autoroute nord-sud « Via Carpatia  », permettant la connexion entre Klaipėda, en Lituanie, et Thessalonique, en Grèce.

A l'issue, le Président de la République de Lituanie, Gitanas Nausėda, a souligné que les progrès dans la mise en place des projets Rail Baltica et Via Baltica, l’accélération de la synchronisation avec les réseaux électriques de l’Europe continentale, la connexion du réseau gazier avec la Pologne étaient des objectifs d’une importance stratégique pour la Lituanie. Il a mis en exergue que la Lituanie avait déjà diversifié avec succès ses sources d’approvisionnement en gaz, en construisant le terminal méthanier à Klaipėda via lequel une partie des pays de la région des Trois Mers était approvisionnée en gaz. 

Le Président lituanien Gitanas Nausėda

Car, de fait, les pays membres de l’Initiative des Trois mers ont en commun, à l’exception de l’Autriche, même si sa partie orientale fut occupée par l’Union soviétique de 1945 à 1955, d’avoir tous connu des régimes communistes d’inspiration soviétique, voire d'avoir été occupés par la Russie soviétique. Et ce sont les événements de Crimée et l'annexion de celle-ci par la Russie en mars 2014 qui ont conduit les pays d’Europe centrale à l’origine de l’Initiative à accélérer un processus politique spécifique visant à coordonner leurs actions.



mercredi 7 octobre 2020

Monument à la mémoire d'un des chefs de la Résistance lituanienne, Adolfas Ramanauskas-Vanagas

 

Statue d'Adolfas Ramanauskas-Vanagas

Alors qu’elle s'était déclarée neutre, la Lituanie a été successivement occupée pendant la seconde guerre mondiale par l'URSS (juin 140 – juin 1941) , puis par l'Allemagne nazie, après que celle-ci se soit retournée contre son ancien allié soviétique.

En Février 1944, les Allemands autorisèrent la création, par le Général Povilas Plechavičius, d’une force territoriale lituanienne de défense (Lietuvos vietinė rinktinė), espérant en faire une unité supplétive des SS. Refusant toutes les tentatives allemandes de phagocyter son unité forte de 20 à 30 000 hommes, Plechavičius fut arrêté par les Allemands le 15 Mai 1944, avec un millier de cadres et de soldats. Environ une moitié des effectifs réussirent à s’enfuir dans les forêts et constituèrent l’Armée Lituanienne de la Liberté (Lietuvos laisvės armija ou LLA), s’attaquant aux forces d’occupation soviétiques à partir de l'été 1944

Les partisans en Lituanie, plus connus sous le nom de « Frères de la Forêt », étaient organisés en une véritable armée, avec des combattants en uniforme et une chaîne de commandement, contrôlant l’ensemble du territoire de la Lituanie en dehors des villes, armée organisée en trois régions militaires et neuf districts, jusqu’en 1949.  

Jonas Žemaitis


En Février 1948, les leaders de la résistance se réunirent dans le village de Minaičiai et établirent un commandement central, l’Union lituanienne des combattants de la Liberté (Lietuvos laisvės kovos sąjūdis ou LLKS). Jonas Žemaitis en fut élu le chef. Le 16 Février 1949, date du 31ème anniversaire de l’indépendance de la Lituanie, le bureau du LLKS signa une déclaration fixant que la Lituanie, une fois sa souveraineté restaurée, serait un État démocratique, fondé sur la Liberté et les valeurs démocratiques, où tous les citoyens auraient les mêmes droits. En 1999, le Seimas (Parlement) reconnut formellement ce document comme une déclaration d’indépendance. 

Adolfas Ramanauskas (6 mars 1918 – 29 novembre 1957), nom de code Vanagas (faucon), était au moment de la déclaration du 16 février 1949, chef provisoire de la région sud de la Lituanie, la Dzūkija . Il fut alors nommé adjoint à Jonas Žemaitis et commandant-en-chef des forces de défense donc, comme l'a statué la Cour Constitutionnelle en 2018, commandant-en-chef des forces armées légales de la République de Lituanie.


Adolfas Ramanauskas-Vanagas

La guérilla contre l'occupant soviétique dura jusqu'en 1953. Après plusieurs années de traque, Ramanauskas-Vanagas fut arrêté et sauvagement torturé par les soviétiques en 1956, puis exécuté un an plus tard par le KGB, son corps jeté dans une fosse commune. Ses restes ne furent retrouvés qu'en 2017 au cimetière Našlaičiai d'Antakalnis et formellement identifiés en 2018.


Plus de 60 ans après avoir été exécuté, Adolfas Ramanauskas, avait eu droit le 6 octobre 2018, à des funérailles nationales et avait été ré-inhumé au cimetière d'Antakalnis. Des milliers de Lituaniens s'étaient pressés dans les rues de Vilnius pour lui rendre un dernier hommage



Ce mardi 6 octobre 2020, un monument à la mémoire d'Adolfas Ramanauskas-Vanagas (ci-dessus) fut dévoilé au cimetière d'Antakalnis au cours d'une cérémonie solennelle. Le Président Gitanas Nausėda déclara à cette occasion que les Lituaniens devaient exprimer une gratitude éternelle au commandant en chef des partisans contre l'occupation soviétique.