Après la révolution de
février 1917 en Russie, le gouvernement provisoire d’Alexandre Kerenski avait
promis qu’il reconnaîtrait le droit à l’autodétermination des peuples
minoritaires de l’Empire. Mais la Rada (assemblée constitutive) établie à Kyiv (Kiev) n’obtint
rien et, le 19 novembre 1917, au lendemain de la révolution d’octobre, elle proclama une République démocratique, immédiatement reconnue par la France et la Grande-Bretagne,
connue sous le nom de République Nationale Ukrainienne, en Ukrainien Українська Народна Республіка / UNR. A noter que cette République n’était pas séparée
de la République russe.
Mais, reniant leurs
propres principes, comme ce fut également le cas dans les Etats baltes, et
comme ce le sera encore en 1991, les bolcheviques déclarèrent hors la loi l’UNR
et fondèrent en Ukraine une série de républiques populaires des soviets. Outre
les bolcheviques, l’UNR avait également contre elle les Russes blancs de Dénikine
et les Polonais. En réaction, le Rada proclame l’indépendance complète de l’Ukraine le 22 janvier 1918. Mais, dès
le mois de février 1918, les bolcheviques prirent le contrôle des principales villes du
pays, dont Kyiv, défendue pendant 12 jours par Symon Petlioura. En mars 1918, ils installèrent à Kharkov (Kharkiv)
une République socialiste soviétique ukrainienne.
Symon Petlioura |
C’est lors de l’avancée
des bolcheviques vers Kyiv d’une division de l’Armée rouge, forte de 4 000
hommes et commandée par le Colonel Mikhaïl
Mouraviev, que se situe la bataille de Krouty, le 29 janvier 1918. Je n’ai
pas trouvé si ce Colonel Mouraviev avait un lien de parenté avec le Général-comte
Mikhaïl Mouraviev-Vilenski, dit « le pendeur de Vilnius ». Mais il le
mériterait car il se vantera, après la prise de Kyiv, de « n’avoir fait de
quartier à personne et d’avoir utilisé des gaz asphyxiants ». La division
commandée par ce Colonel est composée des régiments de Pétrograd et de Moscou
de l’Armée rouge, ainsi que de marins de la flotte de la Baltique.
En face, c’est un petit détachement
de cadets de l’UNR, aux ordres du Capitaine
Ahapiy Honcharenko, qui essaye d’intercepter les rouges. Ce détachement de
500 hommes (certaines sources disent même 300) était principalement constitué d’élèves
fantassins de Sitch, d’une unité de l’Ecole des Cadets de Khmelnytskyi et de
Cosaques Haïdamaks.
Le Capitaine Honcharenko |
Les combats eurent lieu
près de Krouty, à 130 km au nord-est de Kyiv, en réalité aux premières heures
du 30 janvier 1918, même s’ils sont commémorés le 29 janvier. Près de la moitié
des jeunes Ukrainiens périrent pendant la bataille qui dura près de 5 heures. Lorsque
la Rada put se réinstaller à Kyiv, les 500 élèves qui avaient combattu reçurent
le titre de héros de l’Ukraine.
Bien évidemment, le
gouvernement soviétique ukrainien occulta la bataille. Avec le retour à l’indépendance
(24 août 1991), celle-ci devint le symbole de la résistance à l’armée
soviétique. En 2006, le gouvernement ukrainien érigea le mémorial des héros de
Krouty sur le site même de la bataille.
Pièce de monnaie commémorative de 2001 |
Krouty est une des
batailles les plus vénérées en Ukraine, pour sa dimension particulièrement
sacrificielle. La jeune garde ukrainienne livrait son premier combat contre l’invasion
bolchevique, combat inégal qu’elle ne pouvait remporter, mais devoir sacré dont
elle sut courageusement s’acquitter.
Слава Україні !
NB :
Cet article est largement inspiré d’un excellent article bien plus détaillé, « 30
janvier 1918 : la bataille de Krouty », du non moins excellent PanDoktor (http://scythica.fr/dok/30-janvier-1918-la-bataille-de-krouty/)
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