Exemplaire de la Constitution du 3 mai 1791 |
Pour comprendre le 3 mai
1791, il faut remonter au 1er
juillet 1569 ! Ce jour-là est en effet signée l’Union de Lublin entre le Royaume de Pologne et le Grand-duché de
Lituanie, ce dernier étant sous la menace du Tsarat de Russie d’Ivan IV dit le Terrible. Il est créé à
cette occasion la République des deux Nations au sein de laquelle la Pologne et
la Lituanie étaient théoriquement sur un pied d’égalité. Mais la Pologne, plus
grande et culturellement plus attractive, domina la Lituanie.
La noblesse lituanienne et ruthène se polonisa, mais les gens du peuple,
surtout les paysans, continuèrent à parler dans leurs propres langues et, pour
les Ruthènes, à pratiquer la religion orthodoxe. Ceci créa finalement un fossé
important entre les classes sociales.
Sur un plan légal, l'Union de Lublin avait prévu que la Lituanie et la
Pologne noueraient des liens étroits, mais ce qui ne fut pas le cas. En
effet, les Deuxième (1566) et Troisième (1588) Statuts de la Lituanie, que la
noblesse polonaise considérait comme inconstitutionnels, continuaient de
contredire l'Union de Lublin sur beaucoup de points.
Sigismond II Auguste (Tableau de Lucas Cranach le jeune) |
En outre, en tentant d'équilibrer le pouvoir des magnats (grande noblesse)
avec celui de la szlachta (petite noblesse), le Roi de Pologne Grand-duc de
Lituanie Sigismond II Auguste espérait imposer le pouvoir de la
monarchie. En vain. En fait, alors que les États voisins évoluaient vers la
monarchie absolue, forte et centralisée, la République des Deux Nations
glissait, elle, vers l'anarchie politique.
La Constitution du 3 Mai 1791 fut une ultime
tentative pour arrêter ce glissement vers l’anarchie, alors qu’une partie
du territoire avait déjà été amputé par le premier partage de 1772. Cette
Constitution révolutionnaire, inspirée par l’esprit des Lumières, la deuxième
dans le monde après celle des Etats-Unis, aurait dû faire de la République de
Pologne-Lituanie un état unitaire, avec une monarchie héréditaire. Elle
abolissait beaucoup des inconvénients du vieux système, comme le liberum
veto. Elle étendait les droits politiques à la bourgeoisie, augmentait les
droits des paysans et réaffirmait la tolérance religieuse.
Mais cette Constitution ne sera pas ratifiée par les Lituaniens et, en tout
état de cause, n’aura pas le temps d’être appliquée, du fait des partitions de
1793 et 1795.
Le comte Stanislas Potocki |
Car le parti pro-russe des grands magnats polonais, menés par le comte
Stanislas Potocki, s’oppose à la Constitution et forme la confédération de Targowitsa, à laquelle le Roi adhérera lui-même le
23 juillet 1792, abolissant de facto la Constitution qu’il avait lui-même
promulguée.
Une diète réunie à Grodno consent alors au second démembrement du pays au
profit de la Russie (13 juillet 1793) et de la Prusse (23 septembre 1793). Tadeusz Kościuszko conduit l’insurrection patriotique contre l’invasion des Russes et des
Prussiens, émancipe les serfs et promet des réformes sociales (Manifeste de Połaniec du 7 mai
1794). Mais l’Autriche entre dans la guerre, l’insurrection est vaincue, le Roi
est contraint à l’abdication et la Pologne – Lituanie et partagée entre les
trois puissances, Russie, Prusse et Autriche.
Curieusement, la Pologne a fait de ce 3 mai une Fête Nationale, ce qui est
pour le moins original quand on sait que ce fut une occasion manquée !
Armoiries de la République des Deux Nations |
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