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dimanche 31 mai 2020

Future élection présidentielle au Bélarus




La prochaine élection présidentielle au Bélarus aura lieu le dimanche 9 août 2020. Le Président en titre, Aliaksandr Loukachenka, est candidat pour un sixième mandat. Le résultats peuvent-ils être cette année différents de celui des scrutins des années précédentes (1994, 2001, 2006, 2010, 2015) tenus dans un contexte de répression de l'opposition et de scrutins jugés non libres ?

Manifestement la machine totalitaire est déjà en marche !

Déjà, lors des élections législatives de novembre 2019, visant à élire les 110 membres de la Chambre des représentants, les partisans de Loukachenka ont remporté la totalité des sièges ! L'opposition ayant été en grande partie empêchée de concourir , ça a largement facilité les choses !



Mais aussi avant-hier, 29 mai, à Grodno, un rassemblement de collecte de signatures de soutien au candidat Siarhiej Cichanouski , un bloggeur (!), a été perturbé par des provocateurs. Mais, évidemment, c'est Siarhiej Cichanouski qui a été arrêté (cf. ci-dessus) ! Dans le même temps, le site TUT.by, qui diffusait l'arrestation, a été l'objet d'une cyberattaque ! Loukachenka est donc bien décidé à avoir son sixième mandat !

Il faut dire que les sondages en ligne (« Pour qui voteriez-vous ? ») ne créditent Loukachenka que de 1 à 5 % des votes, ce qui fait désordre. La course serait largement menée par Viktar Babaryka , un banquier. Le Ministre de l'Information a d’ailleurs pris son téléphone pour rappeler aux médias indépendants qui avaient publié ces sondages en ligne que seules les agences contrôlées par l’État étaient, en période électorale, autorisées à la faire !



A Minsk, mais aussi en province (cf. ci-dessus à Gomel), des foules immenses font la queue pour soutenir les candidats de l'opposition. Les gens semblent ne plus avoir peur. Il est vrai que le port de masques anti-virus empêche le KGB de pouvoir reconnaître les manifestants ! Lesquels manifestant ont pris comme emblème la pantoufle, car avec une pantoufle on écrase les cafards. D'où le slogan « Stop aux cafards ! »




jeudi 14 mai 2020

14 mai 1972 : Romas Kalanta s'immole par le feu




Le 14 Mai 1972, à midi, le jeune étudiant de 19 ans (né le 22 Février 1953 à Alytus), Romas Kalanta, s’arrose de 3 litres d’essence et met le feu à ses vêtements. L’événement se déroule à Kaunas, près de Laisvės alėja (allée de la Liberté), sur la place devant le Théâtre de musique.

Le geste de Romas Kalanta avait pour but de protester contre l’occupation de la Lituanie par les soviétiques. A côté de lui, il avait déposé un carnet dont le contenu n’a été révélé qu’au retour de la Lituanie à l’indépendance en 1990, après l’ouverture des archives du KGB. Il y était inscrit « Dėl mano mirties kaltinkite tik santvarką » (Seul le régime est responsable de ma mort). Il meurt le lendemain 15 mai, à 4 heures du matin.



L’endroit n’avait pas été choisi par hasard. C’est en effet dans ce théâtre que, le 21 Juillet 1940, le Seimas du peuple, parlement fantoche issu d’élections truquées pour légitimer l’occupation et l’annexion de la Lituanie par l’URSS, décida par acclamation de la création de la République Socialiste Soviétique de Lituanie et demanda son admission dans l’Union Soviétique.

Le régime soviétique tenta d’étouffer l’incident, mais la nouvelle se diffusa de bouche à oreille. Le 18 Mai, les obsèques de Romas Kalanta furent avancées de plusieurs heures afin d’éviter de leur donner une trop grande publicité, mais cette initiative eut l’effet inverse. Le lendemain, 3 000 personnes défilèrent sur Laisvės alėja et 402 d’entre elles furent arrêtées, dont la moitié avaient moins de 20 ans. Ces jeunes furent accusés de hooliganisme, terme encore en vigueur aujourd'hui dans la Russie poutinienne, et parmi eux 8 furent condamnés à 1 ou 2 ans de prison.

La tension resta très vive à Kaunas et le KGB enregistra 3 à 4 fois plus d’incidents antisoviétiques dans les années 1972 – 1973. Pendant cette période, 13 autres Lituaniens se suicidèrent par le feu à travers toute la Lituanie.

Ces événements ne furent pas connus en Occident, tant l’URSS était un État-prison, et n’eurent pas le retentissement que le même geste de Jan Palach, le 16 Janvier 1969 à Prague, eut à l’ouest. Mais, même à rebours, ils font réfléchir sur le désespoir de ces jeunes gens qui ont eu le courage de ces actes désespérés pour attirer l’attention du monde sur l’asservissement de leur pays par la Russie soviétique.

Et dire qu’aujourd’hui certains justifient le pacte Molotov – Ribbentrop et glorifient Staline !



Monument du sculpteur Robertas Antinis sur Laisves aleja, inauguré en 2002



vendredi 8 mai 2020

Autour du 8 Mai 1945 en Lettonie



Le 7 Mai 1945 à 02H41, le Generaloberst allemand Alfred Jodl (et non pas Gustav comme indiqué ci-dessous), en tant que mandataire du nouveau chef de l’Etat, le Großadmiral Karl Dönitz, signe à Reims la reddition sans condition de l’armée allemande en Europe.



Le 7 Mai ? Oui, car Staline exigeant que la capitulation allemande se fasse à Berlin, une nouvelle signature a lieu le 8 Mai dans la capitale du Reich occupée par les soviétiques. Le document entre en vigueur le 8 Mai à 23H01, heure de Berlin. Mais comme il est alors 01H01 le lendemain à l’heure de Moscou, cela explique que les soviétiques et aujourd’hui les Russes, célèbrent le 9 Mai la victoire dans la « Grande guerre patriotique ».

On notera au passage que, pour les Russes, la deuxième guerre mondiale n’a commencé que le 22 Juin 1941, au déclenchement de l’opération Barbarossa par les Allemands. Car, auparavant, depuis le pacte Molotov – Ribbentrop du 23 Août 1939, les soviétiques et les nazis étaient alliés. L’attaque de la Pologne le 17 Septembre 1939, le massacre de Katyn au printemps 1940 et l’occupation des Pays baltes à partir du 17 Juin 1940 ne sont donc apparemment que des « points de détail de l’histoire ».

Pacte Molotov-Ribbentrop

Contrainte de signer un « traité d’assistance mutuelle » avec l’URSS le 31 Octobre 1939, traité qui impose l’installation de bases soviétiques sur son territoire, la Lettonie est finalement occupée dans la nuit du 16 au 17 Juin 1940 quand 200 000 soldats soviétiques prennent possession des principaux points stratégiques. Des « élections » sont organisées les 14 et 15 Juillet auxquelles seul le parti communiste letton est autorisé à présenter une liste. Le demande d’adhésion de la Lettonie à l’Union soviétique, présentée par l’ « assemblée » ainsi élue est acceptée le 5 Août 1940.Ce fut le prélude d’une soviétisation qui se basait sur les déportations de masse et les liquidations, la plus importante des déportations étant celle du 14 Juin 1941 (plus de 14 000 personnes déportées)

Après l’attaque allemande du 22 Juin 1941, Riga fut occupée par les nazis le 1er Juillet 1941. Durant l’été 1944, l’Armée rouge repoussera progressivement la Wehrmacht vers l’ouest. Riga est occupée le 13 Octobre 1944. Le terme d’ « occupation » est bien celui qu’il convient d’employer, dans la mesure où, avant la guerre, la Lettonie comme les deux autres États baltes, était un État souverain qui avait signé un traité de paix avec la Russie soviétique le 11 Août 1920, et s’était déclarée neutre lors de la déclaration de guerre.

Soldats soviétiques devant le monument de la Liberté à Riga


Le 8 Mai 1945 représente donc pour les Lettons une nouvelle occupation qui ne cessera qu’en Août 1991. Comme en Lituanie, mais à un degré moindre, se constituera un mouvement de résistance, les Frères de la Forêt. Mais, non coordonné, sans aide extérieure, le mouvement disparaîtra au début des années 1950. Le 25 Mars 1949, les autorités d’occupation déporteront 13 000 familles de paysans réfractaires à la collectivisation. En 1959, le « bon » M. Nikita Khrouchtchev entreprend une politique de russification et le Letton perd son statut officiel.  

Après 50 années d’occupation, dont 47 ans par les Russes, on doit donc comprendre que les Lettons puissent voir d’un œil réprobateur le rassemblement annuel le 9 Mai de milliers de russophones dans le Parc de la Victoire (ci-dessous).