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mercredi 23 juin 2021

22 juin 1941 : l'Allemagne se retourne contre son alliée soviétique

 


Le 22 juin 1941, à 4 heures du matin, Staline est réveillé par un coup de fil du général Joukov dans sa datcha des environs de Moscou : « C'est la guerre ! » : les troupes allemandes viennent de pénétrer en Union soviétique. Comment en est-on arrivé vu sous l'angle des États baltes ?

Le 23 Août 1939, l’Allemagne nazie et la Russie soviétique signaient un pacte de non-agression, dit pacte Molotov – Ribbentrop. Dans les protocoles secrets, les deux États totalitaires se partageaient les États souverains qui se trouvaient entre eux, dont la Pologne et les États Baltes, en zones d’influences. Mutuellement sécurisés, l’Allemagne attaque la Pologne le 1er Septembre 1939 et, le 17 septembre, c’est au tour de la Russie d’attaquer cette même pauvre Pologne par l’est, avec deux groupes d’armées. Une parade militaire commune entre les nazis et les soviétiques a lieu le 23 Septembre à Brest-Litovsk pour sans doute fêter la « victoire ».

Un an plus tard, les troupes soviétiques entraient dans les États Baltes sous des prétextes totalement fantaisistes. Mais qui se souciait à l’époque de ces « nations trop petites, trop seules pour tenir tête, trop lointaines pour que leur appel au secours fût entendu » ? Il faut dire qu’en ce 15 Juin 1940, les panzers allemands déboulaient en France…… Après l’annexion forcée des États Baltes en août 1940, l’Union soviétique va rapidement instaurer un régime d’occupation.

La répression commença dès juillet 1940, juste avant de pseudo élections, par des emprisonnements et des exécutions. Le Livre noir du communisme cite 1 480 exécutions. Elle culmine dans la nuit du 13 au 14 Juin 1941. Ce jour-là, 10 000 Estoniens, plus de 15 000 Lettons et près de 23 000 Lituaniens sont déportés.

Le 22 Juin 1941, l’Allemagne nazie se retourne contre son ancien allié soviétique et se lance à la conquête de la Russie en déclenchant l’opération « Barbarossa », du nom de l'ancien empereur germanique Frédéric 1er Barberousse.



LWehrmacht remporte d'abord des succès spectaculaires face à une Armée rouge de 4 millions de soldats et 170 divisions, mais démoralisée et décapitée par la disparition de la moitié des officiers généraux dans les purges staliniennes. En août, les Allemands encerclent Kiev, capitale de l'Ukraine, et entrent dans la ville le 19 septembre. Au nord, ils entament le 8 septembre le siège de Leningrad (aujourd'hui Saint-Pétersbourg). Celui-ci durera 900 jours.



Dans les États Baltes, les soldats allemands sont parfois accueillis en libérateurs, compte tenu des exactions soviétiques qui ont précédé, les populations espérant retrouver leur indépendance. Mais leur enthousiasme sera rapidement refroidi, les États étant intégrés dans l’ « Ostland », une organisation administrative qui prépare la colonisation. Mais on dit généralement qu’il n’y aurait pas eu cet accueil s’il n’y avait eu auparavant les crimes soviétiques contre les populations civiles.


Riga

Pour les Russes d’aujourd’hui, la « Grande Guerre patriotique » ne commence que le 22 Juin 1941 et on ne parle pas de ce qui s’est passé avant. Dans l’historiographie officielle russe, il n’y a d’ailleurs pas eu d’occupation des États Baltes. En outre, pour les vainqueurs, il ne peut pas y avoir de crimes de guerre. En Lituanie (mais c’est aussi sans doute le cas en Lettonie et en Estonie), il n’existe pas de famille qui n’ait eu de déportés, que ce soit en 1941 ou en 1949. Mais pour Monsieur Poutine, la chute de l’URSS a été la plus grande catastrophe du XXe siècle ……..




lundi 21 juin 2021

Louis XVIII, SDF royal

 

Le comte de Provence jeune

Dans la nuit du 20 au 21 juin 1791, une berline lourdement chargée s'éloigne de Paris. À son bord le roi Louis XVI, la reine Marie-Antoinette et leurs deux enfants, Madame Élisabeth, la sœur du roi, et la gouvernante des enfants. Le 21 soir, au relais de poste de Sainte-Menehould, le maître de poste, Jean-Baptiste Drouet, qui a séjourné à Versailles, et qui, selon la légende, compare le visage du "valet de chambre" à l'effigie royale d'un écu, reconnaît le roi. Dans la nuit, la berline est arrêtée à Varennes en Argonne , le roi est formellement reconnu. La famille royale est renvoyée à Paris sous bonen escorte le 22 juin au matin.

Pendant ce temps-là, le 21 juin 1791 au matin, Louis-Stanislas-Xavier de France, comte de Provence, « Monsieur », futur Louis XVIII, s'enfuit du Palais du Luxembourg. Sous le nom de Michel Foster, grâce et en compagnie du comte, futur duc, d'Avaray et d'un domestique anglais, déguisé en marchand anglais, il va, lui, arriver le 23 juin à Mons, dans les Pays-bas autrichiens. Le 7 juillet 1791, il arrive à Coblence pour rejoindre l'armée des émigrés dont le chef de facto est son jeune frère le comte d'Artois, futur Charles X.

Le 26 janvier 1793, c'est à Hamm, en Westphalie, que les deux frères apprennent l'exécution du roi Louis XVI le 21 janvier. Le Dauphin, bien qu'enfermé à la prison du Temple, devient Louis XVII aux yeux des royalistes. Ce n'est qu'à son décès en 1795 que le comte de Provence deviendra officiellement Louis XVIII.

Il va s'ensuivre pour Louis XVIII, de 1793 à 1807, une longue période faite d'exil, d'isolement et souvent de pauvreté. Il est successivement à Turin (1794), Vérone (1794-1796), Riegel dans le Brisgau (1796) et Blankenburg dans le duché de Brunswick (1796-1798). Expulsé de Blankenburg à l'instigation du gouvernement français, il doit accepter l'hospitalité que le Tsar Paul 1er lui offre à Mitau, actuelle Jelgava en Lettonie.


Le château de Mitau, aujourd'hui Jelgava

Dans l'ancien palais des ducs de Courlande, Luis XVIII retrouve à peu près un style auquel il était habitué à Versailles. Ils se constitue une maison, avec une suite de 108, plus une centaine de gardes du corps équipés au frais du Tsar. Il passe le plus clair de ses journées dans son cabinet à expédier ses « affaires », tout comme s'il avait régné. Le 10 juin 1799, le duc d'Angoulême, fils aîné de son frère d'Artois, y épouse Marie-Thérèse-Charlotte, fille orpheline de Louis XVI et de Marie-Thérèse.

Mais le 20 janvier 1801, Louis XVIII est expulsé de Mitau à cause d'une lettre du comte d'Avaray, méprisante envers Paul 1er. Il rejoint Varsovie après un voyage chaotique qui voit notamment le roi, 46 ans, et sa nièce passer deux heures à pied dans la neige ! Il vont passer trois dans les palais du roi de Prusse avant que celui-ci, exaspéré par ces Français turbulents, ne les expulse lui aussi en septembre 1804.


Louis et Marie-Thérèse-Charlotte dans la neige

Louis va retrouver Mitau, mais un château de Mitau qui, depuis son précédent passage, a été abandonné et pillé. De plus, la pension de 200 000 roubles accordée par le Tsar n'est a priori pas payée régulièrement. Le tsar qui le visite fin mai 1807, avant la rencontre de Tilsit avec Napoléon 1er, déclarera : « C'est l'homme le plus nul et le plus insignifiant d'Europe » !

Mitau n'étant qu'à 300 km de Tilsit, c'est de lui-même que Louis XVIII quittera la Courlande pour l’Angleterre, via le port de Libau (Liepaja), le 3 septembre 1807, à bord du navire suédois « Troya ».

Louis XVIII séjournera en Angleterre de 1807 à 1814, et seule la chute de Napoléon 1er , enrayée provisoirement par les Cent Jours (20 mars-22 juin 1815), permettra la restauration de la monarchie bourbonienne. Il aura passé un tiers de sa vie, soit 23 ans, en exil.

Le "Roi-fauteuil"




samedi 19 juin 2021

Le Bélarus ne s'appelle pas Biélorussie

 



A la lumière de la crise actuelle, un certain nombre de pays ont commencé à comprendre que le Bélarus n'était pas la Biélorussie. En France, notamment dans les médias, on continue à appeler Biélorussie un pays qui ne porte plus ce nom depuis septembre 1991 !

Il y a une raison historique à ce changement de nom bientôt vieux de 30 ans.

Le nom original du pays el langue bélarusse est Беларусь, ou en alphabet latin Biełaruś. La partie « Biela » signifie blanc, vraisemblablement au sens de libre. Mais la partie «  ruś » ne désigne en aucun cas la Russie, mais la Rus' de Kiev, État fédératif souverain qui a existé du milieu du IXᵉ au milieu du XIIIᵉ siècle et qui est l'ancêtre de l'Ukraine et du Bélarus actuels. La traduction exacte en français de Беларусь serait donc Ruthénie blanche. Rappelons que c'est le Grand-prince de Moscou, Ivan IV dit le Terrible, qui prendra en 1547 le titre de « Tsar de toutes les Russies », signifiant de ce fait qu'il revendiquait au profit unique de Moscou la totalité de l'héritage de la Rus', dont une partie des anciens territoires se trouvaient alors sous la domination de la République Polono-lituanienne, et notamment le Bélarus actuel.

Clairement, utiliser aujourd'hui le terme de Biélorussie, comme sous la période soviétique, serait reconnaître des droits à la Russie sur le territoire bélarusse.



Certains pays ont compris cette subtilité. En novembre 2019, Ann Linde, la Ministre suédoise des Affaires Étrangères écrivait “The Ministry of Foreign Affairs will use the term Belarus instead of Vitryssland. We do this to recognise the will of Belarusian people, civil society and the diaspora to emphasise their national identity and sovereignty.” En février 2021, la chancelière Angela Merkel dans une vidéo appelée Solidarität mit den Frauen und Männern in Belarus utilisait les termes de Belarus et belarussisch au lieu de Weißrussland et weißrussich. En mars 2021, c'est le Ministre danois des Affaires Étrangères qui décidait d'utiliser Belarus au lieu de Hviderusland.

La France, tout comme l’Union Européenne, ne reconnait pas la légitimité de la réélection d’Alexandre Lukashenka. Mais continuer d'appeler officiellement, notamment sur le site de l’ambassade de France à Minsk, le Bélarus Biélorussie est à mon sens un mauvais signal.


Libérez Roman Protasevich !



lundi 14 juin 2021

14 Juin 1941 : déportations soviétiques dans les Pays Baltes

 


Le 23 août 1939, l’Allemagne nazie et la Russie soviétique signaient un pacte de non-agression, dit pacte Molotov – Ribbentrop. Dans les protocoles secrets, les deux États totalitaires se partageaient les États souverains qui se trouvaient entre eux, dont la Pologne et les États Baltes, en zones d’influences. Mutuellement sécurisés, l’Allemagne attaque la Pologne le 1er septembre 1939 et, le 17 septembre, c’est au tour de la Russie d’attaquer cette même pauvre Pologne par l’est, avec deux groupes d’armées. Une parade militaire commune entre les nazis et les soviétiques a lieu le 23 Septembre à Brest-Litovsk pour sans doute fêter la «victoire».

Un an plus tard, les troupes soviétiques entraient dans les États Baltes sous des prétextes totalement fantaisistes. Mais qui se souciait à l’époque de ces « nations trop petites, trop seules pour tenir tête, trop lointaines pour que leur appel au secours fût entendu » ? Il faut dire qu’en ce 15 juin 1940, les panzers allemands déboulaient en France…… Après l’annexion forcée des États Baltes en août 1940, l’Union soviétique va rapidement instaurer un régime d’occupation.

La répression commença dès juillet 1940, juste avant de pseudo élections, par des emprisonnements et des exécutions. Le Livre noir du communisme cite 1 480 exécutions. Il s'agit principalement des membres de l'exécutif, de politiques considérés dangereux, d'anciens combattants "blancs", d'exilés politiques, d'auteurs de répressions contre les communistes, de cadres de l'armée d'active ou de réserve, et de personnes occupant des postes stratégiques.

La répression culmine dans la nuit du 13 au 14 Juin 1941. Ce jour-là, 10 000 Estoniens, plus de 15 000 Lettons et près de 23 000 Lituaniens sont déportés. En Lituanie, on compte parmi les déportés: 5 536 personnes ayant des activités dans les partis dits bourgeois et les organisations nationalistes et anti-soviétiques, 3 165 anciens grands propriétaires, industriels, commerçants et hauts fonctionnaires du gouvernement bourgeois, 1 582 hauts fonctionnaires de la police et du système pénitentiaire, 1 430 anciens officiers de l’armée lituanienne. En Lettonie, sur les 15 425 personnes déportées le 14 Juin, 3 751 ont moins de 16 ans, 1 614 ont moins de 7 ans.



L’écrasante majorité de ces déportés meurent durant les transferts ou durant les premiers mois de captivité. Par exemple, sur 2 500 lettons déportés en 1940-41 dans des camps de concentration de la région de Perm, seuls 17 étaient encore vivants en 1952. C’est un arrêté strictement secret No.1299-526 du Comité Central du Parti Communiste de l'URSS du 14 mai 1941 "sur la déportation des éléments socialement étrangers des Républiques baltes, de l'Ukraine occidentale, de la Biélorussie occidentale et de la Moldavie" qui fixe les modalités de ces déportations.

Le 22 Juin 1941, l’Allemagne nazie se retourne contre son ancien allié soviétique et se lance à la conquête de la Russie en déclenchant l’opération « Barbarossa ». Dans les États Baltes, les soldats allemands sont parfois accueillis en libérateurs, compte tenu des exactions soviétiques qui ont précédés, les populations espérant retrouver leur indépendance. Mais leur enthousiasme sera rapidement refroidi, les États étant intégrés dans l’ « Ostland », une organisation administrative qui prépare la colonisation. Mais on dit généralement qu’il n’y aurait pas eu cet accueil s’il n’y avait eu auparavant les crimes soviétiques contre les populations civiles.

Pour les Russes d’aujourd’hui, la « Grande Guerre patriotique » ne commence que le 22 Juin 1941 et on ne parle pas de ce qui s’est passé avant. Dans l’historiographie officielle russe, il n’y a d’ailleurs pas eu d’occupation des États Baltes. En outre, pour les vainqueurs, il ne peut pas y avoir de crimes de guerre. En Lituanie (mais c’est aussi sans doute le cas en Lettonie et en Estonie), il n’existe pas de famille qui n’ait eu de déportés, que ce soit en 1941 ou en 1949. Comment appeler alors ces exactions Monsieur Poutine, vous pour qui la chute de l’URSS a été la plus grande catastrophe du XXe siècle, vous qui réhabilitez l'assassin Staline ?