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mardi 30 octobre 2012

Législatives en Ukraine : flou et magouilles



Staline disait : « Ce qui compte ce n’est pas le vote c’est comment on compte les votes ». Il semblerait que l’Ukraine ait emboîté le pas à la Russie pour remettre à l’honneur cet aphorisme, à l’occasion des élections législatives qui se sont déroulées ce dimanche.

On rappellera tout d’abord que le Parlement monocaméral ukrainien, la Verkhovna Rada, est composé de 450 députés, élus pour moitié au scrutin proportionnel de listes (pour autant que celles-ci reçoivent au moins 5 % des votes), pour moitié au scrutin majoritaire à un tour dans les circonscriptions. Un point de détail est important : il faut 300 députés sur 450 pour pouvoir modifier la Constitution.  



Dimanche 28 Décembre à 20H, cinq instituts de sondage donnaient les fourchettes suivantes pour les résultats « sortie des urnes » :

# Parti des Régions (Yanukovych)        entre 27 et 32 %
# Opposition unie (dont Tymoshenko) entre 23 et 24 %
# UDAR (Klitschko)                            entre 13 et 15 %
# Communistes                                    entre 11 et 13 %
# Svoboda (nationalistes)                   entre 11 et 12 %

Lundi 29 décembre à 21H10, alors que seulement 79,24 % des votes ont été comptés, les résultats à la proportionnelle seraient les suivants (source Kyiv Post) :

# Parti des Régions     32,5 %
# Opposition Unie       23,6 %
# Communistes            14,1 %
# UDAR                      13,3 %
# Svoboda                   9,3 %

C’est une relative déception pour UDAR qui, dans les derniers sondages d’avant vote, avait atteint la deuxième place. C’est une bonne surprise pour Svoboda qui va entrer pour la première fois au Parlement. Ce devrait être une déception pour l’Opposition unie, quand on sait qu’en 2007 le parti Batkivshchyna de Ioulia Tymoshenko, aujourd’hui un des membres de la coalition d’opposition, avait atteint à lui seul 30 %.   

En outre, chacun est resté dans son rôle, le Parti des Régions criant victoire, l’opposition criant à la fraude, les observateurs de la CEI attestant d’élections démocratiques, ceux de l’OSCE dénonçant une transparence insuffisante et critiquant l’abus de « ressources administratives ». Ioulia Tymochenko, en prison en principe pour 7 ans, a engagé une grève de la faim pour protester contre « la falsification des élections ».  



Mais ce sont les résultats des 225 circonscriptions qui votaient au scrutin majoritaire, attendus plus tard dans la semaine, qui vont être déterminants. Or, d’après les premières tendances (le dépouillement étant toujours en cours), une moitié des élus devraient provenir du Parti des Régions, l’autre moitié seraient des indépendants. L’expérience de 1998 et 2002 a prouvé que ces « indépendants » votaient le plus souvent avec le parti au pouvoir ; c’est la raison pour laquelle le scrutin de circonscription avait été abandonné après la Révolution orange de 2004. Et sans doute la raison pour laquelle il a été rétabli pour ces législatives 2012.

Savoir combien d’ « indépendants » vont rejoindre de facto le Parti des Régions ou les communistes est très important. Car, si l’ensemble dépassait les 300 députés, cela pourrait ouvrir la voie à une modification de la Constitution. Le Président Viktor Yanukovych ne fait pas mystère de son intention de garder le pouvoir le plus longtemps possible, le fait que son principal adversaire, Ioulia Tymochenko, soit en prison en est la preuve. Or, il n’est pas sûr d’être réélu au suffrage universel en 2015. Si un changement de la Constitution pouvait permettre qu’il soit élu par le Parlement arrangerait manifestement ses affaires.

D’un autre côté, le Parlement serait la tribune indispensable d’un contre-pouvoir, si tant est que l’Opposition unie et UDAR arrivent à s’accorder. Ce n’est pas évident, à l’aune des ambitions personnelles en vue des présidentielles de 2015. Le succès de Svoboda est d’ailleurs peut-être à chercher dans la lassitude des électeurs vis-à-vis de l’opposition traditionnelle.  

Dans tout cela, le grand perdant risque d’être la démocratie en Ukraine, donc les Ukrainiens, et il y a un risque réel de voir un deuxième Bélarus à nos portes.


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