Catherine de Médicis et ses enfants vers 1564 |
L'anniversaire
de la mort du Roi de France Henri III, le 2 août 1589,
poignardé la veille par le moine dominicain Jacques Clément, me
donne le prétexte d'évoquer celui qui fut un éphémère Roi de
Pologne et Grand-duc de Lituanie.
Henri
de Valois était le troisième fils du Roi de France Henri II et de
Catherine de Médicis, Or, Henri II décède accidentellement après
une joute le 15 juillet 1559. Son fils aîné, François II, lui
succède à l'âge de 15 ans, mais, de santé fragile, il décède à
son tour le 5 décembre 1560. Le deuxième fils, Charles IX, monte
alors sur le trône à l'âge de 10 ans.
Henri de Valois à l'âge de 14 ans |
Par
ailleurs, un astrologue avait prédit à Catherine de Médicis
qu'elle verrait tous ses fils sur un trône. Henri
étant son fils préféré, elle se met en devoir de lui trouver un
point de chute, avec des idées parfois extravagantes, comme obtenir
du sultan l'investiture du Royaume d'Alger. En 1572 (Henri a alors 21
ans), elle se met en tête de lui faire épouser Anna, la sœur
quadragénaire du Roi de Pologne Sigismond II.
Au
début de 1572, la Reine mère Catherine de Médicis envoie en
reconnaissance à Cracovie (alors capitale de la Pologne) Jean de
Montluc, seigneur de Balagny, 17 ans, fils naturel de l'évêque de
Valence, accompagné di secrétaire particulier du dit évêque-père,
Jean Choisnin, Mais ils ne verront pas le Roi Sigismond II qui décède
le 7 juillet 1572.
Henri de Valois à l'âge de 19 ans |
Or,
l'Union de Lublin signée le 1er
juillet 1569, prévoyait des liens étroits entre le
Royaume de Pologne et le
Grand-duché de Lituanie,
sous la direction d'un
monarque élu. Catherine de Médicis envoie alors Jean de Montluc,
évêque de Valence (le père de Balagny), pour négocier l'élection
d'Henri. Faisant sentir aux
Polonais le danger que constituaient pour leur liberté les trois
principaux autres prétendants (l'archiduc Ernest d'Autriche, Ivan
IV dit
le terrible,Tsar de Russie
et le Roi de Suède Jean III Vasa), il
n'eut paraît-il même pas besoin de se servir de moyens de
corruption.
Henri
de Valois, duc d'Anjou, fut élu Roi de Pologne le 9 mai
1573.
Pour monter sur le trône,
le postulant avait dû accepter les conditions imposées par la
noblesse par lesquelles la Nation recevait la pleine souveraineté.
Ce sont les « Articles
d'Henri »
(Articuli Henriciani)
qui furent plus tard la cause de l'anarchie qui paralysa par la suite
l'action des souverains polono-lituaniens Déclaration permanente
que tous les rois élus devaient jurer de respecter, ils étaient
complétés par la « Pacta Conventa », engagements
personnels du futur Roi.
Henri
mit « un certain temps » pour rallier Cracovie, puisqu'il
ne fut couronné que le 21 février 1574.
Mais, le 14 juin 1574, il
apprend la mort de son frère le Roi de France, décédé le
30 mai à l'âge de 24 ans
sans héritier. Après un règne de 148 jours, Henri s'enfuit de
Cracovie dès le 18 juin 1574,
sans rien dire aux Polonais, dans des conditions rocambolesques. En
fait, il ne s'était jamais fait à la Pologne et il ne voulait
surtout pas se faire souffler la place de Roi de France par son petit
frère François, duc d'Alençon (qui complote effectivement dans ce
sens).
Couronné
Roi de France à Reims le 13 février 1575 sous le nom d'Henri III,
Henri de Valois va se heurter à quatre guerres de religions avant
donc d'être poignardé le 1er
août 1589 à Saint-Cloud par le moine Jacques Clément.
Après
un long interrègne, c'est Stefan Batory (en Hongrois Báthory
István),
Voïvode de Transylvanie,
qui est élu le 14 décembre 1575, et couronné le 1er
mai 1576, après avoir épousé Anna, la
sœur plus que jamais
quadragénaire du feu
Roi de Pologne Sigismond II.
Stefan Batory |
Les articles henriciens, et d’autres lois comme les garanties de liberté religieuse, sont étonnamment modernes. On y retrouve les règles fondamentales qui existent dans toute république ou royauté parlementaire. Le Roi n’a finalement aucun pouvoir sauf s’il possède un charisme suffisant pour lui permettre de jouer de son influence … un peu à la manière d’une Elisabeth II de Grande-Bretagne ! Dans le cas contraire, il sera incolore, inodore et insipide.
RépondreSupprimerRemarquons aussi que les électeurs, c-à-d la noblesse, représentait environ 10% de la population (25 à 30% en Mazovie !). A comparer avec la France et l’Angleterre du XIXe siècle qui n’accordaient ce droit qu’à 3% de la population en 1830 pour la première et 1% pour la seconde en 1860.
Pourtant deux aspects fondamentaux viciaient le système. Le premier est le 'liberum veto', une hérésie dans tout système démocratique, même s'il est seulement accessible à une classe, et le second le sarmatisme qui faisait de la noblesse une caste non seulement supérieure sur le plan social mais aussi sur le plan «racial». Rien ne pouvait lier la noblesse à la population des pays qu’ils dominaient sinon un rapport de dominant à dominé tel qu'on le retrouvait dans les colonies. Et cela valait aussi bien pour les Polonais non nobles que pour les roturiers lituaniens ou ruthènes.
Un privilège supplémentaire qui permettait de former des confédérations (c-à-d des partis) de nobles armés (p.ex., Confédération de Bar contre l’ingérence de la Russie mais aussi celle du Roi qui voulait limiter les pouvoirs des magnats), fut aussi la cause de la perte de la Pologne et de son dépeçage.
Finalement, ce qui aurait pu évoluer en une démocratie parlementaire à l’image de la Grande Bretagne a sombré dans l’anarchie à cause de la vue étroite et égoïste de ceux qui firent passer leurs privilèges avant l’obligation première du bien et de la défense du pays.