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dimanche 14 avril 2013

L’affaire Magnitski pour les nuls !

Sergueï Magnitski


Régulièrement, nous entendons parler d’une « affaire Magnitski » qui empoisonne les relations entre les Etats-Unis et la Russie. Je reconnais que, « comme tout le monde », j’ignorais de quoi il s’agissait. Pour vous (et pour moi ……), j’ai eu la curiosité d’essayer d’en savoir plus, avec le plus d’objectivité possible.

Au début était William "Bill" Browder, co-fondateur (avec Edmond Safra) du fond d’investissement "Hermitage Capital Management" en 1996 (siège à Guernesey et bureaux à Moscou et dans les îles Caïman) et accessoirement petit-fils d’un ancien leader du parti communiste des Etats-Unis (!). Le but d’"Hermitage Capital Management" était d’investir en Russie, profitant de la vague de privatisations d’alors, et il devint rapidement l’investisseur étranger en Russie le plus important, détenant des parts dans, notamment, Gazprom, Inter RAO, Rosneft et Sberbank.

William Browder

Approuvant initialement la politique de Vladimir Poutine, Bill Browder en vint toutefois à critiquer celui-ci, les oligarques russes et le système de kleptocratie (système politique où une ou des personnes à la tête d’un pays pratiquent la corruption à grande échelle). Jusqu’à ce jour du 13 Novembre 2005 où Browder est refoulé à l’aéroport de Moscou-Cheremetievo parce que « représentant une menace pour la sécurité nationale russe ».

Le 4 Juin 2007, la police investit les bureaux moscovites d’Hermitage, saisissant documents et ordinateurs de la firme et de trois de ses filiales, lesquels vont devenir les instruments d’une gigantesque malversation. C’est suite à ce raid que Bill Browder confie au juriste Sergueï Magnitski, un avocat fiscaliste russe né le 8 Avril 1972, la mission de  découvrir la raison de cette saisie.

Sergueï Magnitski découvre alors une fraude fiscale à grande échelle impliquant des policiers, des juges et des fonctionnaires des impôts. La saisie des filiales d’Hermitage leur aurait ainsi frauduleusement rapporté, en un temps record, 135 millions d’€. Bill Browder décide de porter plainte pour récupérer ses sociétés, mais les six avocats internationaux travaillant sur cette affaire, intimidés, préfèrent quitter la Russie. Seul Magnitski porte la plainte, en Juin 2008.  

Fin Novembre 2008, Magnitski est arrêté sous l’accusation de fraude fiscale au profit de Browder et emprisonné à la prison de Boutyrskaïa (là même où avait été jadis emprisonné Jonas Žemaitis-Vytautas). Il y décède le 16 Novembre 2009 dans des circonstances non élucidées (mais ce pourrait être par manque de soins pour une pancréatite), quelques jours avant la limite légale de pré-détention sans procès d’un an. L’ancien médecin-chef adjoint de la prison, mis en examen pour négligence, a été relaxé le 28 Décembre 2012.   

La prison de Boutyrskaïa

Dès le 14 Décembre 2012, le Président Barack Obama avait signé un projet de loi qui abrogeait l’amendement Jackson-Vanik, qui datait de 1974 et qui imposait de sévère restrictions aux échanges commerciaux avec l’Union soviétique, puis avec la Russie. Mais, en même temps, il instaurait des sanctions consulaires et financières contre les fonctionnaires russes impliqués, selon Washington, dans la mort de Sergueï Magnitski. En représailles, la Douma russe votait le 19 décembre 2012 la loi dite Dmitri Yakovlev interdisant l’adoption d’enfants russes par des citoyens américains.

Ce vendredi 12 Avril 2013, l’administration américaine publiait la liste des 18 personnes visées par les sanctions économiques de la loi Magnitski. Dès le lendemain, samedi 13 Avril 2013, la Russie publiait sa propre liste, dite liste Guantanamo, de 18 responsables américains « impliqués dans les violations des droits de l’homme », qui seront interdits d’entrée sur le territoire russe.

Aujourd’hui, 14 Avril 2013, on en est donc là d’une escalade qui empoisonne de plus en plus les relations russo-américaines.

Vladimir Poutine et Barack Obama


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