Sergueï Magnitski |
Régulièrement, nous
entendons parler d’une « affaire Magnitski » qui empoisonne les
relations entre les Etats-Unis et la Russie. Je reconnais que, « comme
tout le monde », j’ignorais de quoi il s’agissait. Pour vous (et pour moi ……),
j’ai eu la curiosité d’essayer d’en savoir plus, avec le plus d’objectivité
possible.
Au début était William "Bill" Browder, co-fondateur (avec Edmond Safra) du fond d’investissement
"Hermitage Capital Management" en 1996 (siège à Guernesey et
bureaux à Moscou et dans les îles Caïman) et accessoirement petit-fils d’un
ancien leader du parti communiste des Etats-Unis (!). Le but d’"Hermitage
Capital Management" était d’investir en Russie, profitant de la vague de
privatisations d’alors, et il devint rapidement l’investisseur étranger en
Russie le plus important, détenant des parts dans, notamment, Gazprom, Inter
RAO, Rosneft et Sberbank.
William Browder |
Approuvant initialement la
politique de Vladimir Poutine, Bill Browder en vint toutefois à critiquer celui-ci,
les oligarques russes et le système de kleptocratie
(système politique où une ou des personnes à la tête d’un pays pratiquent la
corruption à grande échelle). Jusqu’à ce jour du 13 Novembre 2005 où Browder est refoulé à l’aéroport
de Moscou-Cheremetievo parce que « représentant une menace pour la
sécurité nationale russe ».
Le 4 Juin 2007, la police investit les bureaux
moscovites d’Hermitage, saisissant documents et ordinateurs de la firme et de
trois de ses filiales, lesquels vont devenir les instruments d’une gigantesque
malversation. C’est suite à ce raid que Bill Browder confie au juriste Sergueï Magnitski, un avocat fiscaliste
russe né le 8 Avril 1972, la mission de
découvrir la raison de cette saisie.
Sergueï Magnitski découvre
alors une fraude fiscale à grande échelle impliquant des policiers, des juges
et des fonctionnaires des impôts. La saisie des filiales d’Hermitage leur
aurait ainsi frauduleusement rapporté, en un temps record, 135 millions d’€.
Bill Browder décide de porter plainte pour récupérer ses sociétés, mais les six
avocats internationaux travaillant sur cette affaire, intimidés, préfèrent
quitter la Russie. Seul Magnitski porte la plainte, en Juin 2008.
Fin Novembre 2008, Magnitski est
arrêté sous l’accusation de fraude fiscale au profit de Browder et emprisonné à
la prison de Boutyrskaïa (là même où avait été jadis emprisonné Jonas Žemaitis-Vytautas).
Il y décède le 16 Novembre
2009 dans des circonstances non élucidées (mais ce pourrait être par
manque de soins pour une pancréatite), quelques jours avant la limite légale de
pré-détention sans procès d’un an. L’ancien médecin-chef adjoint de la prison,
mis en examen pour négligence, a été relaxé le 28 Décembre 2012.
La prison de Boutyrskaïa |
Dès le 14 Décembre 2012, le
Président Barack Obama avait signé un projet de loi qui abrogeait l’amendement
Jackson-Vanik, qui datait de 1974 et qui imposait de sévère restrictions aux
échanges commerciaux avec l’Union soviétique, puis avec la Russie. Mais, en
même temps, il instaurait des sanctions consulaires et financières contre les
fonctionnaires russes impliqués, selon Washington, dans la mort de Sergueï Magnitski.
En représailles, la Douma russe votait le 19 décembre 2012 la loi dite Dmitri Yakovlev
interdisant l’adoption d’enfants russes par des citoyens américains.
Ce vendredi 12 Avril 2013, l’administration
américaine publiait la liste des 18 personnes visées par les sanctions
économiques de la loi Magnitski. Dès le lendemain, samedi 13 Avril 2013, la Russie publiait sa
propre liste, dite liste Guantanamo, de 18 responsables américains « impliqués
dans les violations des droits de l’homme », qui seront interdits d’entrée
sur le territoire russe.
Aujourd’hui, 14 Avril
2013, on en est donc là d’une escalade qui empoisonne de plus en plus les
relations russo-américaines.
Vladimir Poutine et Barack Obama |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire