Georges Frédéric Parrot |
Ce n’est certes pas vous
faire injure que de penser que peu d’entre vous ont déjà entendu parler de Georges Frédéric Parrot (1767 – 1852),
ce Français qui eut, comme disait feu mon ami Edmond Zajac, une vie colorée. Il
fut notamment le premier recteur de l’Université Impériale de Dorpat (Tartu).
Mais au fait, était-il
vraiment Français ? Georges Frédéric Parrot est né en 1767 à Montbéliard. Mais, à l’époque, la ville
appartenait depuis 1397 au comté puis duché (1495) de Württemberg et s’appelait
Mömpelgard ! Entre 1534 et
1537, tout le duché de Württemberg adopta la Réforme protestante. La ville ne
fut annexée par la France qu’en 1793, annexion confirmée en 1796, et surtout en
1806 par la « Médiation germanique », lorsque le Württemberg devint
un Royaume à la disparition du Saint Empire Romain Germanique.
Carte du Saint Empire Romain germanique en 1789 |
Georges Frédéric Parrot
est donc clairement né sujet du Duc de Württemberg. De famille protestante
aisée, son père, chirurgien et même médecin personnel du Duc à Montbéliard,
ayant été même élu Maire de la ville, Georges Frédéric est envoyé à Stuttgart, capitale du Duché, pour
étudier la physique et les mathématiques (1782 – 1786). C’est en 1795 qu’il
part pour la Livonie, pour des
raisons financières, ayant besoin de revenus fixes après son mariage. Depuis le
Traité De Nystad (10 Septembre 1721), la Livonie était une partie de l’Empire
russe, mais la noblesse germano-balte y conservait ses privilèges, son pouvoir
de juridiction et ses assemblées locales.
Le gouvernement russe de
Livonie (capitale Riga) était limité au nord par le gouvernement russe
d’Estland (capitale Reval, aujourd’hui Tallinn) et au sud par le Duché de
Courlande, devenu en 1795 gouvernement russe de Courlande (capitale Mitau, aujourd’hui
Jelgava).
Georges Frédéric Parrot
fut initialement nommé Premier secrétaire de la Société Livonienne charitable
et économique (Livländische
gemeinnützige und ökonomische Sozietät).
Puis quand, en Avril 1802, le Tsar Alexandre 1er décide de rouvrir
l’Université de Dorpat (Kaiserliche Universität zu Dorpat, aujourd’hui Tartu en
Estonie), la seule université luthérienne et en langue allemande de l’Empire
russe, Parrot y est initialement nommé titulaire de la chaire de mathématiques,
puis à celle de physique.
Dès cette même année 1802,
Georges Frédéric Parrot fut élu comme premier recteur de l’Université de Dorpat
par les professeurs titulaires d’une chaire. A ce poste, il combattit pour la
liberté et l’autogestion de l’Université, contre la pression politique des
barons germano-baltes. Son heure de gloire survint le 22 Mai 1802, lorsque le Tsar Alexandre 1er s’arrêta à
Dorpat sur la route de Memel (Klaipėda), où il allait rencontrer le Roi de
Prusse, Frédéric Guillaume III. Le Tsar fut impressionné par l’éloquence et les
idées de Parrot, si bien qu’il s’en suivit une amitié de 10 ans, assortie d’un
grade de Conseiller d’Etat.
Le bâtiment principal de l'Université de Dorpat en 1821 |
En 1811, Parrot fut élu
membre correspondant de l’Académie des Sciences de Saint-Pétersbourg, dont il
deviendra membre à part entière en 1826. Il quittera d’ailleurs l’Université de
Dorpat pour prendre la direction du laboratoire de physique de l’Académie des Sciences
de Saint-Pétersbourg. Il décédera en 1852 à l’occasion d’un voyage à
Helsingfors (Helsinki), dans ce qui était alors le Grand-duché de Finlande,
autonome dans l’Empire russe.
Dans la seconde moitié du
XIXème siècle, Tartu sera le centre culturel des Estoniens à l’époque
du nationalisme romantique.
Alors, Georges Frédéric
Parrot ? Allemand ? Russe ? Livonien ? Français ? Et si, peu importe sa citoyenneté, il était un de ces innombrables vecteurs de
la culture européenne, symbole d’ouverture et de liberté, à l’image d’un Erasme
militant pour la paix en Europe, symboles que certains voudraient aujourd’hui voir
disparaître ?
A noter que l’accord franco-estonien de coopération
scientifique et technologique, signé en Juillet 2002, porte son nom.
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