Qui aurait cru il y a
quelques mois que la Russie aurait, non seulement occupé, mais annexé la Crimée
ukrainienne ? Même pas moi, puisque ce n’est qu’en Septembre 2013 que
j’avais lancé un voyage de ma Promotion de Saint-Cyr à Odessa et en Crimée pour
commémorer les 160 ans du début de la guerre éponyme, voyage depuis bien
évidemment annulé.
Aujourd’hui, les Spetsnaz
du GRU (voir post d’hier) sont à l’œuvre dans l’est de l’Ukraine pour jouer le
même scénario. Mais M. Poutine s’arrêtera-t-il là ou continuera-t-il dans sa
conquête de l’Europe annoncée par son idéologue Alexandre Douguine ?
J’étais récemment en Lituanie
et en Lettonie (du 10 au 17 Mars 2014). J’ai été très frappé de l’inquiétude de
mes amis lituaniens, notamment à Kaunas. Il faut dire qu’ils se souviennent du
synopsis de l’occupation de juin 1940 : provocations montées de toute
pièce, entraînant l’invasion des Etats baltes, non-réactions des occidentaux
(certes, à l’époque, occupés ailleurs), synopsis en tous points semblable à ce
qui se passe aujourd’hui en Ukraine.
Cette inquiétude s’appuie
sur les faits suivants :
# Les exercices
russo-bélarusses « Zapad » (le dernier, « Zapad-2013 », a
eu lieu du 20 au 26 Septembre 2013). Le thème, pas vraiment crédible, en était
de facto une réaction des forces russo-bélarusses à une attaque des Baltes
contre le gouvernement bélarusse.
# Les activités aériennes
russes, depuis le Bélarus et l’exclave de Kaliningrad, ont apparemment augmenté
ces temps-ci autour des Etats baltes. Ce qui a entraîné la mise en place de
renforts (6 F-15C Eagle US) au profit de la mission OTAN de police du
ciel à Šiauliai (nord de la Lituanie), et d’autres (britanniques, danois) sont
à venir.
# Dernier avatar, jeudi 10
avril dernier : des exercices militaires apparemment non annoncés à
Kaliningrad, au cours duquel un
destroyer et une corvette russes, dans la zone économique spéciale lituanienne, déroutaient des navires de
commerce, ce qui a nécessité l’intervention d’un navire de guerre lituanien.
# Au passage, cette
exclave de Kaliningrad, coincée entre Pologne et Lituanie, est une épine dans le pied de l’UE et de
l’OTAN car on ne sait pas exactement ce qu’il s’y passe, quels sont les moyens
militaires exacts sur place, et la Russie menace tous les quatre matins de
mettre des missiles balistiques sol-sol de courte portée (500 km maxi) Iskander
en réaction au projet de bouclier anti-missiles US. Ce qui menacerait la
Lituanie et la Lettonie, et une bonne partie de la Pologne.
On sait que le Président
russe peut désormais envoyer ses troupes là où il veut pour
« défendre » les russophones où qu’ils soient. Dans la région, les
russophones sont surtout en Lettonie (région de Daugavpils et en Estonie
(région de Narva). J’ai personnellement noté ces temps-ci une recrudescence des
attaques des médias russes contre le statut des non-citoyens en Lettonie
(« violation des droits de l’homme » !). Mes interlocuteurs lituaniens
ne semblaient pas persuadés que l’OTAN interviendrait automatiquement pour
défendre les Etats baltes si ceux-ci étaient attaqués, malgré l’article 5 de la
Charte de l’OTAN.
Il y par d’ailleurs,
apparemment, une certaine psychose en Lituanie quand on voit que, le 8 avril, à
Druskninkai (sud de la Lituanie, près de la frontière avec le Bélarus), à
l’occasion d’une coupure accidentelle d’électricité, les habitants ont cru à
une attaque bélarusse !
En outre, depuis le 7
avril, la Russie interdit les importations de porc en provenance de Pologne et
de Lituanie pour suspicion de grippe porcine, alors que celle-ci est endémique
en Russie ! Cela survient après l’interdiction, pour des raisons tout
aussi fantaisistes, des importations du lait lituanien pendant plusieurs
mois !
Enfin, le 14 Avril, « The
Baltic Times » signalait une enquête de la chaîne de télévision lettone
TV3 indiquant que des agents russes sondaient secrètement les habitants de la
zone frontière lettone avec la Russie pour avoir leur opinion sur l’annexion de
la Crimée…….
Psychose ou réel danger ? A mon sens, la pression sur les Etats
baltes pourrait se faire par des moyens militaires (gesticulation aux
frontières) mais aussi économiques. Il serait en tout état de cause
irresponsable de ne pas l’envisager.
Soldats lituaniens en Afghanistan |
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