Le mardi 6 Novembre 2012, alors
que le monde entier avait les yeux fixés sur l’élection présidentielle
américaine, le Président russe Vladimir Poutine limogeait par surprise son
Ministre de la Défense, Anatoli Serdioukov,
50 ans. Officiellement, celui-ci serait accusé d’avoir détourné plusieurs millions
d’Euros dans la cadre de la privatisation d’actifs immobiliers appartenant au
Ministère de la Défense, via la société Oboronservis.
Officieusement, le Ministre aurait aussi trompé son épouse qui se trouve être
la fille d’un des plus anciens alliés de Poutine, Viktor Zoubkov, vice-premier
Ministre et président du conseil des directeurs de Gazprom.
Anatoli Serdioukov |
Anatoli Serdioukov a été
remplacé par Sergueï Choïgou, 57
ans, ancien Ministre des Situations d’Urgence, qui avait été nommé en début
d’année Gouverneur de la région de Moscou. Considéré par les Russes comme l’un
de leurs rares hommes politiques efficaces,
il est surtout un exécutant fidèle des ordres du pouvoir, sans jamais
faire d’ombre à Poutine.
Sergueï Choïgou avec Vladimir Poutine |
Dans la foulée, 3 jours
plus tard (hier 9 Novembre), le chef d’Etat-major des Armées, le Général Nikolaï
Makarov était lui aussi limogé et remplacé par le Général Valery Gerassimov, promu en prime premier vice-ministre de
la Défense. Vladimir Poutine lui a demandé de poursuivre les réformes visant à
moderniser les forces armées et d’améliorer les relations avec l’industrie de
défense. Ce dernier point est une allusion claire aux tensions existantes sous
le mandat du Ministre Serdioukov, celui-ci s’étant mis à dos la majorité des
généraux et une grande partie des fabricants d’armes russes en brisant le tabou
de l’autarcie.
Car, jusqu’à un passé récent,
la Russie se faisait un point d’honneur d’équiper ses armées avec exclusivement
du matériel domestique. Mais, de plus en plus, des voix s’étaient élevées au
sein des Armées pour dénoncer le gonflement abusif des tarifs, le retard
systématique des délais de livraison et la fourniture de matériels
technologiquement dépassés.
Le BPC "Mistral" à Saint-Pétersbourg |
C’est la raison pour
laquelle l’armée russe a acheté deux Bâtiments de Projection et de Commandement
français de type « Mistral » (avec le budget pour en acheter deux
autres), qu’Oboronservis assemble
depuis Février 2012 des blindés légers italiens LMV Iveco, rebaptisés
« Lynx » (150 ont été fabriqués en 2012), et que des drones israéliens
ont été achetés pour les « étudier » en vue d’une production russe à
partir de 2014. Moscou serait également intéressée par l’achat du tout nouveau
blindé de transport de troupe « Boxer » allemand.
C’est que Vladimir Poutine
a placé la barre très haute. Dans une tribune publiée le 20 Février 2012 dans Rossiiskaya Gazeta, il a déclaré que
23 000 milliards de roubles (plus de 570 milliards d’Euros) seraient
alloués dans les dix ans à venir pour développer les forces armées et
moderniser l’industrie de défense russe. D’ores et déjà, le budget russe de la
défense a augmenté de 58 % en 2012 par rapport à 2011.
Il semble donc que la
modernisation de l’armée russe ne soit pas un effet d’annonce, ou (seulement)
un gage donné aux siloviki. Le
réarmement est effectif, Poutine l’a justifié en raison « des politiques
de défense antimissile des Etats-Unis et de l’OTAN », le but étant de
« créer une armée et une industrie militaire qui garantiront la
souveraineté de la Russie, le respect de la part de nos partenaires et une paix
durable » (tribune du 20 Février 2012).
Reste à savoir si la
Russie va désormais tourner le dos aux industriels d’armement étrangers, dans
la foulée du limogeage d’Anatoli Serdioukov. Achèteront-ils les deux Mistral
suivants, dont les transferts de technologie, exigés par les Russes, ne sont
pas encore négociés. Quid des hélicoptères d’Eurocopter et des systèmes Félin (Fantassin à équipement et liaisons intégrées) produits par Sagem ?
J’en connais qui vont être
contents si la Russie décide de s’équiper russe, ce sont les Baltes, qui
avaient fait des …… vagues quand la France, membre de l’OTAN, avait décidé de
fournir des matériels offensifs susceptibles de se retourner contre d’autres
membres de l’OTAN.
Missile balistique intercontinental Topol-M |
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