Guillaume Apollinaire, après sa trépanation (en tenue du 96e régiment d'Infanterie) |
Un 9 Novembre, j’aurais pu
parler de la chute du mur de Berlin, le 9 Novembre 1989 ; mais c’est un
peu un « marronnier ». J’aurais pu également parler du décès du
Général de Gaulle, le 9 Novembre 1970.
J’ai choisi de parler du
décès de Guillaume Apollinaire, le 9
Novembre 1918. Il y a deux raisons à ça.
Apollinaire, de son vrai
nom Wilhelm Albert
Włodzimierz Aleksander Apolinary Kostrowicki, est né à Rome le 25 Août 1880, de père
inconnu, sujet polonais de l’Empire russe, sa mère, Angelika Kostrowicka, étant née à Nowogródek (aujourd’hui Navahroudak au Bélarus) dans une famille noble du Grand-duché de
Lituanie.
La
deuxième raison tient à la Première Guerre mondiale, et s’inscrit dans l’étude
que j’ai entreprise, en vue de l’écriture de la préface française d’un recueil
du poète letton Aleksandrs Čaks sur
les tirailleurs lettons, «Mūžības
skartie » (Touchés par l’éternité).
Car ce qui est
intéressant, c’est le rapport des poètes, et au-delà des écrivains, à la
Première Guerre mondiale.
Guillaume Apollinaire,
citoyen russe, poète déjà reconnu (« Alcools » est paru en Avril
1913), essaye de s’engager dans l’Armée française dès le 10 Août 1914. Son
engagement n’est accepté qu’à la deuxième tentative, en Décembre 1914, ce qui
lance la procédure de naturalisation. Le 6 décembre 1914, il arrive au 38e
régiment d’Artillerie de campagne à Nîmes. Il part pour le front de
Champagne le 4 Avril 1915.
Après avoir été agent de
liaison, brigadier fourrier et « observateur aux lueurs », il est
chef de pièce le 1er Septembre 1915. Il participe à la seconde
offensive de Champagne (qui débute le 25 Septembre 1915), dans le secteur des
Hurlus, offensive au cours de laquelle l’écrivain alors encore suisse Blaise
Cendrars, qui sert à la Légion Etrangère, perd son bras droit. Le 18 Novembre,
il est affecté au 96e Régiment d’Infanterie, dans le secteur de la
butte de Tahure.
Le 9 Mars 1916, il est
naturalisé français. Le 14 Mars 1916, il remonte en ligne au Bois des Buttes,
au sud-est du Chemin des Dames. Le 17 Mars 1916, il est blessé d’un éclat
d’obus à la tempe droite. Evacué sur Paris, il subit le 9 ou 10 Mai 1916 (la
date diffère selon les sources) une trépanation visant à enlever l’hématome dû
au choc de la blessure. Sa convalescence sera longue et douloureuse. Le 17 Mai
1916, il reçoit une Citation à l’ordre
du Régiment et la Croix de Guerre.
Tombe d'Apollinaire au Père-Lachaise |
En 1917, il renoue avec
les milieux artistiques et est parallèlement promu Lieutenant le 28 Juillet
1918. Mais, affaibli par sa blessure, il meurt le 9 Novembre 1918 (le jour de
l’abdication de l’Empereur d’Allemagne Guillaume II), à l’âge de 38 ans,
victime de la grippe espagnole qui ravage alors l’Europe. Comme il s’était
engagé pour la durée de la guerre, il est déclaré « Mort pour la
France ». Il est inhumé le 13 Novembre au cimetière du Père-Lachaise,
division 86. Son monument-menhir a été conçu par Picasso.
Le Lieutenant Charles Péguy (assis, à droite) |
Il est intéressant de
voir, à l’image d’Apollinaire, des écrivains et des poètes s’engager ou
devancer l’appel pour aller défendre la France au cours de cette Première
Guerre mondiale : le Lieutenant de réserve Charles Péguy, bien sûr, l’écrivain Roland Dorgelès, qui s’engage bien que réformé pour raison de
santé, Henri Barbusse, engagé
volontaire dans l’Infanterie malgré ses positions pacifistes d’avant-guerre, Louis-Ferdinand Céline qui devance l’appel,
dès 1912, a fortiori le Suisse Blaise
Cendrars, déjà cité, étranger comme Apollinaire, cité à l’ordre de l’Armée
et décoré de la Médaille Militaire.
Blaise Cendrars |
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